Le musée des Beaux-Arts de Bordeaux présente un riche ensemble de plus de 200 œuvres, choisies dans la production des dix dernières années de l’artiste Denis Monfleur, composant un parcours dense à découvrir absolument.

Difficile de définir la sculpture de Denis Monfleur. Nouvelle preuve au musée des Beaux-Arts de Bordeaux avec l’exposition “Peuples de pierre”. Son œuvre a d’abord cette capacité d’échapper à cette réduction liée à toute détermination. Elle puise dans une diversité de registres et de techniques, de matières et de gestes.

Elle pratique des oppositions mais ne s’y résume pas : figuration et abstraction, surface et profondeur, transparence et opacité, rugosité et polissage. Cette sculpture demande d’abord à être regardée pour ce qu’elle convoque, pour ce qu’elle donne à voir. Indépendamment de toute tentative d’inscription dans une direction qui n’est pas nécessairement la sienne.

Entre modernité et archaïsme, simplicité et complexité, elle impose sa propre conduite et se présence solitaire et multiple. Elle s’exprime tantôt dans l’interrogation, tantôt dans le tranchant.

Tradition ancestrale de la taille directe

Denis Monfleur perpétue la tradition ancestrale de la taille directe. Ce qu’il recherche, c’est l’intensité des manifestations instinctives et directes. Il prend ainsi la liberté de créer en faisant appel à des émotions profondes au lieu de viser l’exactitude et révèle par là même son affinité avec une charge affective, une condensation d’énergies vitales et le besoin de revenir aux sources de l’art.

Sa sculpture ne se veut ni souveraine ni autoritaire. Elle souhaite avant tout préserver une audace généreuse mais aussi une forme de sagesse. Tout commence par la pierre, la confrontation à sa dureté et le défi du « basaltique ».

Cette dureté porte en elle la rudesse du réel mais aussi la puissance d’un imaginaire, non seulement le tangible mais aussi l’impalpable. La pierre appelle l’agressivité de l’outil (burin, meuleuse, disqueuse, perforateur), la pénétration d’une intégrité et la brusque révélation. Elle dresse sa part d’inconnu face au sculpteur et réveille en lui des résonances enfouies.

Dialogue avec les œuvres du musée des Beaux-arts de Bordeaux

Sophie Barthélémy, directrice du musée des Beaux-Arts de Bordeaux, a invité Denis Monfleur à inscrire ses sculptures dans une sorte de dialogue avec les œuvres présentées dans les deux ailes du musée.

Ainsi, entre la masse agissante des Individus en roche magmatique volcanique et La Chasse aux lions d’Eugène Delacroix, le Kafka raviné et le François Mauriac découpé d’Ossip Zadkine, la translucidité du Bal des Mexicaines en albâtre et la conversation sacrée de La Vierge à l’Enfant du Pérugin. Mais aussi avec L’Exécuté en granit polychrome sur acier et Arrivée et interrogatoire des galériens dans la prison de Gênes d’Alessandro Magnasco, les femmes-rocailles et Hébé de Pierre-François Berruer, une déambulation s’aère, s’aiguise et s’harmonise autour de voisinages plus ou moins accentués, de liaisons et de suspensions, de silences et d’échos mais aussi du passage d’un univers dans un autre, d’un temps à un autre.

musée-beaux-arts-bordeaux-denis-monfleur
Peuples de pierre de Denis Monfleur au Musée des Beaux-arts de Bordeaux ©F Deval

La Galerie du musée des Beaux-Arts accueille notamment trois Têtes profondes, Moine bouddhiste, Sortir du piège et La Réunion des Stylites, autant d’œuvres marquées par la force encore disponible d’une dimension humaine qui apporte dans ce qui est à venir tout le poids de ce qui a été.

Des Monumentales sont également présentes sur le parvis de la Galerie et celui de la gare Saint-Jean, dans la cour et le jardin de l’Hôtel de Ville.

Didier Arnaudet

Informations pratiques

« Peuples de pierre », Denis Monfleur,
jusqu’au dimanche 7 janvier 2024,
musée des Beaux-Arts, Bordeaux (33).

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *