Aux Eyzies, le Musée national de Préhistoire présente « Les mondes invisibles », l’aboutissement d’un projet au long cours mené par le plasticien Aurélien Mauplot. Une restitution de ses recherches, à la fois sensibles et fictionnelles, formulées à partir de vestiges préhistoriques.

Découvrir des artefacts et les étudier pour formuler des théories sur les modes de vie qu’ils révèlent : telle est la mission des archéologues et chercheurs. Cette élaboration d’hypothèses suppose une capacité de projection qui doit éviter les biais culturels. Elle exige aussi de prendre de la distance avec l’émotion ressentie sur le terrain et de considérer l’objet dans sa stricte dimension scientifique. Pourtant, comment ne pas être troublé par la découverte d’une empreinte de pas glissant dans l’argile qui date de plusieurs millénaires ?

Alors, que se passe-t-il lorsqu’un artiste propose à une institution de référence en médiation scientifique autour de la Préhistoire de mener une recherche fondée sur l’émotion et la fiction ? Une rencontre qui devient collaboration.

Projet itinérant de recherche et de création

Lancé en 2021, « Les mondes invisibles » est un projet itinérant de recherche et de création. Aurélien Mauplot, accompagné d’un réseau de partenaires, a exploré une dizaine de grottes et effectué plusieurs résidences. Sa recherche se décline en divers axes : l’expérience de l’approche au travers de la marche, la transmission, les signes géométriques et, surtout, les vestiges de gestes.

Mouchage de torche sur une paroi, morceau de charbon coincé dans la roche, ces témoignages ténus nouent un lien intime avec leurs lointains auteurs. Ils sont devenus une ressource pour l’artiste, nourrissant son intérêt de longue date pour l’imaginaire fantasmé que suscitent les grottes et le caractère sauvage de leurs occupants.

100 ans auprès d’une groupe de femmes

À partir de ses recherches, Aurélien Mauplot développe un récit imaginaire qui suspend le temps. Celui-ci nous plonge il y a  100 000 ans auprès d’un groupe de femmes marchant dans le désert du Namib. De là à y voir une contribution à la réhabilitation historique du genre féminin, il n’y aurait qu’un pas… Car, ainsi que nous le rappelle la paléontologue Marylène Patou-Mathis, « l’homme préhistorique est aussi une femme ».

La quinzaine d’œuvres produites (installations, photographies, documents et écritures) est à découvrir au fil du musée pour une approche de la Préhistoire située à l’opposé de l’interprétation, questionnant le statut d’archives des images produites et leur capacité de transmission de ces espaces-temps qui demeurent impalpables.

Hélène Dantic

Informations pratiques

« Les mondes invisibles », Aurélien Mauplot,
jusqu’au lundi 5 janvier 2026,
Musée national de Préhistoire, Les Eyzies-de-Tayac-Sireuil (24).