À l’occasion de son désormais traditionnel Grand Mess de rentrée, du 18 au 21 septembre, le Confort Moderne, à Poitiers, célèbre ses 40 ans. Pas de rétrospective au menu, plutôt l’envie d’affronter demain. Point d’étape avec sa directrice, Madeleine Mathé.
40 ans pour une structure, est-ce une étape, un symbole, ou toute autre chose ?
Plus qu’une étape ! C’est génial de voir cette utopie toujours vivante. C’est aussi l’opportunité de célébrer le Confort Moderne tel qu’il est depuis sa rénovation car nous fêtons ses 40 ans et celui de tous ses amis et partenaires ayant œuvré à des propositions communes. Nous allons donner à voir ce que nous portons comme projet pour demain.
Cet anniversaire se tient à la faveur du Grand Mess, événement initié depuis 3 ans. Un moment de rentrée privilégié au cours duquel musiciens et plasticiens accueillis en résidence proposent leurs créations. Depuis 2017, le volet de résidences d’artistes a pris une nouvelle ampleur. Un travail invisible que l’on désire rendre encore plus visible
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Avoir 40 ans est-il synonyme d’une forme d’embourgeoisement ?
La question peut se poser, toutefois, je parlerai plutôt de l’évolution de la structure depuis 2017 avec ses nouveaux usages, ses nouvelles pratiques, et des façons de faire se renouvelant tout en continuant d’emprunter ces chemins qui font que le Confort Moderne est toujours présent dans le paysage et toujours pertinent dans son accompagnement des artistes comme dans ses prises de risque. La programmation du Grand Mess en est le parfait exemple.
Le terme friche culturelle est-il toujours pertinent ?
Nous pouvons encore nous en targuer. De toute façon, à renommée équivalente, peu de lieux en France peuvent s’en réclamer. Le Confort Moderne était précurseur, 20 ans avant la Belle de Mai, à Marseille. Or, cette ambition fonctionne encore aujourd’hui si l’on observe le Lieu Unique à Nantes. Les enjeux artistiques, hors des circuits normés, c’est notre identité depuis les années 1980.
Dernière arrivée dans l’aventure, quel regard portez-vous sur la capacité du Confort Moderne à affronter les coups du sort (1992, l’arrêt des subventions de la part de la Ville de Poitiers ; la crise à la suite du départ de Dominique Truco en 1999 ; les aléas du grand chantier avant la réouverture en 2017 ; la pandémie) ?
Alors, je n’ai jamais porté ce regard, toutefois, à l’échelle de 40 ans, comment ne pas traverser de crises ? Évidemment, ces situations peuvent mettre en péril une structure, mais le Confort Moderne est un phénix. L’équipe est toujours animée par la même ferveur, le même attachement, le même investissement. Elle se bat pour son lieu, croit en ses missions pour les arts visuels et la musique. La vitalité est intacte. Fort de deux labels — Scène de musiques actuelles en 1998 et Centre d’art contemporain en 2022 —, le Confort Moderne est une structure solide prête à affronter le futur avec des visions partagées.
Dans un entretien accordé à Télérama, en 2020, Fazette Bordage, une des 4 mousquetaires historiques du Confort Moderne, rappelait que « l’idée de départ, c’est de redonner le pouvoir aux gens en développant leur confiance en eux grâce à la culture ». Ce but est-il encore d’actualité ?
À titre personnel, c’est la raison qui m’anime. Cette volonté d’émancipation, du pas de côté, de la compréhension du monde. Plus qu’un lieu de « fréquentation culturelle », le Confort Moderne est un lieu de vie accessible au quartier. Cependant, rien n’est jamais acquis…
Comment célèbre-t-on cet anniversaire ?
Depuis novembre 2024, toutes les équipes sont à l’œuvre avec une volonté partagée sur le déroulement de cet anniversaire : nulle nostalgie et le regard tourné vers le futur. Pour autant, nous nous sommes amusés à sortir des archives photographiques. En outre, nous collaborons avec Pulsar, fidèle radio, elle aussi presque quadragénaire, pour un plateau exceptionnel.
Enfin, la Web TV Quartier Libre proposera un programme spécial consacré aux souvenirs du public depuis ces 40 ans. Nous avons également lancé un appel à volontariat pour la création d’une pièce sonore collective et performative, encadrée par Catherine Guesde, dédiée à des musiciens non professionnels et munis d’un instrument à vent électrifié. Cet ensemble se produira en ouverture puis en clôture de ces 4 jours, à l’intensité différente puisque le dimanche sera particulièrement familial.
Quel sera le visage du Confort Moderne dans 40 ans ?
Je n’ai pas forcément envie d’y répondre mais, j’ai très envie de fêter les 50 ans ! Ces dix prochaines années seront dédiées à ouvrir certains endroits méconnus du public comme notre jardin. Nous devons rester aussi forts et singuliers, amplifier notre présence auprès de nos voisins. J’ai envie de consolider également toutes les alliances avec les structures qui nous font confiance.
Nous entrons dans une période qui nécessitera encore plus de solidarité. Aussi faudra-t-il être de plus en plus fort en réseau, se renforcer à cette échelle tout en continuant, plus que jamais, le compagnonnage artistique. Certaines figures devenues célèbres sont restées fidèles, preuve que l’on sait faire.
Propos recueillis par Marc A. Bertin
Informations pratiques
Grand Mess,
du jeudi 18 au dimanche 21 septembre,
Le Confort Moderne, Poitiers (86).