Du 10 au 16 décembre, le festival bordelais des Nuits Magiques met à l’honneur les talents les plus singuliers du cinéma d’animation mondial à travers une sélection de courts métrages que les festivaliers auront la lourde charge de départager.
Depuis 34 ans, le festival des Nuits Magiques donne à voir une autre image du cinéma d’animation. Le bilan parle pour lui. Malgré déménagements et nécessaires évolutions, le festival des Nuits Magiques n’a jamais failli à ses missions : montrer et défendre le cinéma d’animation dans ce qu’il a de plus novateur, d’audacieux et de « magique », afin de provoquer cette même étincelle qui, jadis, toucha les spectateurs découvrant l’étrange praxinoscope d’Émile Reynaud.
Gloire donc à Flip-Book et à Fabrice de la Rosa qui s’entichent de redonner du lustre au format court dans ce qu’il a de plus créatif, comme aux temps héroïques des pionniers du cartoon qui apprenaient à modeler un art encore sans normes et sans barrières.
ARTE en partenaire
Cherchant à sortir du tout-venant, le festival conclut logiquement cette année un partenariat avec Arte, rare chaîne à offrir un espace à ce type de productions ambitieuses, pour nous mitonner une soirée d’ouverture (hors compétition) se partageant notamment entre la fable de trois frères chauves à Istanbul aux relents kafkaïens (Beautiful Men), une adaptation du Matin brun de Frank Pavloff et le récit d’une difficile résilience face à la violence endémique au Mexique (Comme si la terre les avait avalées).
Place ensuite à la partie compétition, à visionner successivement lors de quatre soirées, d’une durée d’1h30 en moyenne, dédiées aux films ados-adultes, quand la cinquième est à destination des plus jeunes spectateurs.
Animation internationale et engagée
Venues de France, d’Allemagne, de Bulgarie, de Slovaquie, de Taïwan, du Brésil et même de Russie, ces diverses productions explorent autant le mystère du couple (Butterfly Kiss, Jeanne et Jean Jean), que la condition des femmes (Following the Line, Porque hoje é Sábado), l’acceptation de soi, la soumission volontaire (Coercive Charity ou Allégeance), ou les questionnements éthiques derrière les actions militantes (Free the Chickens)
Comme pour chaque édition, Les Nuits Magiques mettent en lumière hors compétition la production d’un pays en particulier ; cette année, c’est l’Argentine. Hasard ou choix délibéré, la poignée de titres diffusés dévoile également une tendance à dépeindre un monde étouffant et paranoïaque, où le temps et les gestes des personnages semblent contrôlés ou minutés.
L’animation tirée à quatre épingles
Qu’il s’agisse d’un monde régenté par la lumière (Luminaris), par le tic-tac d’une horloge (Padre), par la répétition infinie (Loop), la farce se nappe d’angoisse et d’anxiété, à plus forte raison quand les gens peuvent se transformer en objets (El empleo) voire en zombies (Zombirama). Pour faire passer le tout, on devrait tout de même s’égayer au son du tango avec Pintango.
Hors compétition encore, notez une sélection de courts autour du voyage, concoctée par les étudiants du Ciné-Club « CinéMarne » de l’université de Bordeaux et un focus sur des réalisations de jeunes talents. Parmi les ateliers d’initiation à l’animation, les aspirants réalisateurs ne manqueront surtout pas la redécouverte de l’écran d’épingles, une technique rarissime qui révélera peut-être les futurs Alexandre Alexeieff et Claire Parker, ces bricoleurs géniaux qui ont travaillé à mettre la « gravure en mouvement ». Une manière de souligner encore que l’animation n’est définitivement qu’un art de l’illusion. Magie, magie…
Nicolas Trespallé
Informations pratiques :
Les Nuits Magiques — Festival international du court métrage d’animation,
Du mercredi 10 décembre au mardi 16 décembre,
Bordeaux (33).