Depuis plus de vingt ans, Caroline “Khima France” Martial et Orion “Groupgris” Bouvier du groupe Kap Bambino délivrent une musique facile pour gens difficiles. Date unique, à Bordeaux, No Domination sous le bras. À prendre ou à laisser selon votre degré de lâcheté.
6 ans de silence entre Dust, Fierce, Forever et No Domination, et l’on vous retrouve sur l’étiquette Cleopatra (Ministry, Motörhead, Chrome, Christian Death, Judy Collins, William Shatner) ! Comment s’est effectuée cette étrange signature ?
Cleopatra est venu à nous il y a déjà deux ans. Peut-être parce que les musiques étranges ont besoin d’une maison de disque comme celle de Brian Perera et son équipe. Nous nous comprenons et partageons la même passion pour Chrome et Hawkwind et bien d’autres visions mystiques. Notre manière de travailler et d’écrire la musique peut parfois prendre 6 ans, 1 mois ou 2 jours. Mais pas un seul jour ne se passe sans musique depuis le début du groupe en 2001.
Quelle était l’humeur pour No Domination ? Il s’en dégage un étonnant parfum début 90 qui ne sonne ni nostalgique ni pastiche.
Car nous ne sommes ni l’un ni l’autre. Nous sommes dans une immersion fantasque et futuriste depuis l’enfance, fortes personnalités et écorchés, notre duo est comme une force qui ressemble à un estomac ayant prédigéré toutes les musiques de l’univers, animé par la faim de créer un sensoriel sonore, noise et énigmatique, mélodieux, en puissance, sans retenue ni collagène synthétique. L’humeur est toujours la même : survivre malgré tout.
La pochette rappelle celle de Satan’s Circus de Death in Vegas. Influence ou non, la trajectoire de Richard Fearless vers une espèce d’effacement sciemment calculé vous inspire-t-elle ?
Nous ne connaissons pas ce groupe, ni sa pochette, ni son parcours. Il ne fait pas partie de nos références.
Quel est le secret d’une carrière de plus de 20 ans ?
« Parce que seule la musique est un soulagement. » Jean-Louis Costes. Et parce qu’on ne sait pas faire autre chose dans la vie que de se sentir vivants en composant et en jouant notre son en live.
Durant ces deux décennies, quels ont été selon vous les bouleversements majeurs, tant au sein de l’industrie musicale que dans la manière dont le public écoute ou “consomme” la musique ?
Peut-être qu’à y regarder de près, le monde aujourd’hui consomme la musique comme il « fait attention » à l’environnement ou à son prochain : moins d’une minute d’attention pour prendre ce qui lui paraît essentiel, juste de quoi se déculpabiliser un instant et jouir précocement, pour vite passer à autre chose, ou le poncer à l’infini. Est-ce un bouleversement ou une évolution ?
Sauriez-vous définir votre place dans le mundillo électronique français ?
Non car nous ne sommes ni électronique ni autre. Et nous nous sommes appliqués.
Votre réputation scénique a traversé le temps. Est-ce toujours le rendez-vous qui vous anime ?
Nous sommes nés pour être sur scène. Jours et nuits, nous sommes animés par cette vie. C’est celle qu’on a choisie, et pour qui on a tout sacrifié.
D’Adult à Crystal Castles, les comparaisons ont toujours été nombreuses. Cela vous touche-t-il ou vous laisse-t-il indifférents ?
Si tous les duos sont comparables, aux yeux parfois d’une certaine presse, écrite sûrement par une personne déjà sur liste d’attente pour le concert d’Oasis, et qui nous met tous dans le même panier, la réponse est oui, ça nous désole encore. Because Music et Cleopatra Records, et ceux qui nous écoutent, nous permettent parfois de souffler un instant, puis de sourire en regardant notre parcours : outsiders depuis 2001, c’est ça notre trésor, notre singularité.
Propos recueillis par Marc A. Bertin
Informations pratiques
Kap Bambino,
vendredi 19 décembre, 20h30,
Rock School Barbey, Bordeaux (33).