Jusqu’au 3 août, le Confort Moderne, à Poitiers (86), accueille la première exposition française d’envergure, consacrée à l’artiste argentine Marina De Caro.
Plasticienne, née en 1961, à Mar del Plata, Marina De Caro a fait de l’espace, de l’expérience du corps, de l’intuition, de la sensibilité et de l’émotion les fondements de son travail. Paradoxe, bien que figure artistique latino-américaine parmi les plus influentes de sa génération, son œuvre demeure méconnue en Europe même si elle est représentée par la galerie In Situ – Fabienne Leclerc, Grand Paris.
Son geste, pluridisciplinaire, intègre dessin, sculpture et performance. Le dessin constitue d’ailleurs l’étape initiale voire fondamentale de chacun de ses projets. Elle dessine, depuis et vers l’âme, des formes fabuleuses, baroques et oniriques. Tour à tour danseuse, performeuse, pédagogue ou tricoteuse, elle réinvente l’espace, repoussant les limites de l’attendu pour donner existence à ce qui vibre, à ce qui surprend la norme, l’habitude, le convenu.
- À lire aussi : Notre-Dame : péril en la demeure à Poitiers
Puntada évoque le point de couture, plus précisément le trait d’union entre deux mailles, tandis que desvelo fait référence à l’esprit en éveil, la nuit blanche. « La couture, associée souvent à une pratique féminine, recèle une valeur méditative. À chaque point, on fixe farouchement une idée, un songe qui habite l’esprit de jour comme de nuit. » Aussi pourrait-on tenter d’interpréter le titre de cette exposition, visible au Confort Moderne, à Poitiers, jusqu’au 3 août, comme « tisser pour rester éveillé » ou « tisser des pensées nocturnes ».
Un parcours mouvementé
Revendiquant un système de l’art dont la finalité est « la transmission et non le musée », on la devine rétive au circuit habituel de l’art contemporain. Rien de surprenant quand on sait qu’elle a fondé en Argentine le collectif Cromoactivismo, qui s’empare de la couleur pour transmettre des messages politiques et poétiques.
Profondément activiste, elle s’intéresse à la refonte du système artistique, à la gestion des projets d’artistes et aux processus éducatifs. Ainsi, entre 2001 et 2005, a-t-elle coordonné le Proyecto Trama de Buenos Aires : un programme international de coopération et de confrontation entre artistes. En outre, elle dirige un atelier d’artistes à Buenos Aires, ainsi que l’École pour l’investigation des incertitudes et la matérialisation des idées.
Issue d’une famille d’architectes et de danseuses, Marina De Caro est habitée par la notion de mouvement. Pour le Confort Moderne, elle a spécialement conçu un accrochage « qui demande du déplacement tout en offrant divers points de vue. Il faut bouger en commençant en zig-zag entre les voiles, vrai-faux rideau inspiré de l’opéra, puis parcourir tranquillement une ligne de dessins, fruit d’une écriture de 10 ans [scrupuleusement espacés de 70 cm et ponctués d’inattendues respirations, NDLR] à un mètre de distance, avant de tourner autour d’une sculpture en tissu. »
Cette dernière, son « Lego® de sculptrice », recouvert de tricots chatoyants appelle instantanément au toucher, rappelant le contact de la laine sur la peau. Une intention pleinement assumée. « Je donne le pouvoir au public. Isolée, mon œuvre ne s’active pas. »
Informations pratiques
« Una puntada para cada desvelo », Marina De Caro,
Jusqu’au dimanche 3 août,
Le Confort Moderne, Poitiers (86).