Du 17 au 19 juin, les 14 élèves de la promo 6 de l’école du tnba présentent leur spectacle de sortie, mis en scène par la performeuse Phia Ménard. Une pièce qui met en jeu le déséquilibre des corps quand les repères vacillent et que l’absurdité règne. Plongée dans sa création, commentée par trois des interprètes.

Comment dire cette instabilité lancinante ? Celle que l’on ressent dans notre monde qui périclite ? C’est ce qui a d’emblée animé les échanges entre Phia Ménard et les élèves. Durant un temps de travail à la table, la discussion s’est nourrie de partage d’expériences, de références, et de désirs quant à la création artistique à façonner sur ce sujet.

D’un commun accord, ce sera « une fiction, sous une forme chorale, poétique et politique », selon Apolline Clavreuil. Avec en toile de fond lointaine, un phénomène naturel survenu il y a 42 000 ans, dont leur parle Phia Ménard : l’événement de Laschamp, une inversion du champ magnétique terrestre, à l’origine d’anomalies environnementales profondes.

Des histoires troublées

Autant d’histoires de troubles qui ne se contentent pas de mots, qui « s’éprouvent » et appellent les corps, souligne Apolline Clavreuil. D’où « un passage très rapide au plateau ». Cela dit, les discussions continuent, rapporte, en observatrice, Nina Drocourt, la chargée de communication de l’école. Chaque retrouvaille commence par des débats sur la situation culturelle actuelle, sur ce que créer signifie en ces temps si inquiets. Des questionnements politiques prégnants pour ces artistes au seuil de leur carrière et cette metteuse en scène engagée, qui trouvent leur pendant poétique au plateau. Comment ?

Phia Ménard donne aux comédiens des indications d’actions simples, relatives à la circularité et la répétition, ouvrant ainsi le champ des possibles. « Elle est friande de voir comment on dépasse les consignes, confie Marion Rozé, et elle tire des fils à partir d’accidents. Pour ça, je me suis toujours sentie en recherche. » Apolline Clavreuil abonde. « On trouve vraiment notre espace en tant qu’interprète. » Le travail se nourrit d’un corpus de textes, tels ceux de Daniil Harms, poète russe de l’absurde, jouant sur la répétition, un langage bégayant, des histoires avortées avant d’avoir commencé ou brutalement déviées.

Une scène à l’écoute

Le jour de l’entretien, la création est encore en cours, rien n’est figé. Mais en scène, c’est certain, les 14 corps agiront comme des caisses de résonance d’un événement qui les déstabilise, dont la cause n’est pas figurée. Ils se déploieront en spirales hypnotiques, en schémas répétitifs, vers le désordre, la transe, tout en veillant à garder une écoute du groupe « pour raconter la même histoire », précise William Burnod. Et, ajoute-t-il, en propageant de la joie, malgré tout. Une résistance essentielle face au chaos.

Hanna Laborde

Informations pratiques

L’Événement de Laschamp,Phia Ménard et l’école du tnba, mise en scène Phia,
Du mardi 17 au jeudi 19 juin,
Tnba, Bordeaux (33)