Comme chaque année, Nérac célèbre le fils prodigue Yves Chaland avec les Rencontres Chaland, un rendez-vous convivial où la crème de la bande dessinée perpétue la mémoire du maître de la ligne claire. Invité d’honneur de cette édition, l’élégant Stanislas.
Génie, esthète, mystérieux, les qualificatifs s’enchaînent dès que l’on évoque la mémoire d’Yves Chaland, comète du 9e Art, dont la carrière n’en finit pas de susciter commentaires et admiration chez ceux qui ont eu la chance de le côtoyer, comme chez ceux qui découvrent encore aujourd’hui des œuvres aussi fondamentales que Freddy Lombard ou Le Jeune Albert.
Dessinateur surdoué, le natif de Nérac a construit l’une des plus belles pages de la bande dessinée des années 1980, devenant une signature incontournable de Métal hurlant. Si la revue s’imposa comme une référence dans la BD d’imaginaire SF à tendance baroque (Druillet, Corben, Nicollet…), elle laissa aussi libre cours à des auteurs en apparence plus classiques, se comportant en héritiers défroqués des Hergé, Jijé, Tillieux, Jacobs.
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Stanislas, la ligne claire dans le rétro
Autour de Ted Benoit, Serge Clerc et quelques autres, le chef de meute Yves Chaland incarne ce renouveau de la ligne claire qui va s’abraser au contact de la culture punk, osant le cynisme et l’humour à froid, ridiculisant l’esprit scout de la BD belge. Autant dire qu’outre la beauté de son trait, la lecture à double et triple niveau du corrosif Chaland reste d’une modernité bluffante, à plus forte raison en ces temps de « moraline » exacerbée.
Par son travail, Chaland prouvait que la ligne claire tenait moins d’une esthétique que d’un état d’esprit, d’une manière d’être, voire d’un rapport particulier au monde.
Stanislas, auteur volontairement à contre-temps
En conviant cette année Stanislas, l’un des cofondateurs de L’Association, les Rencontres Chaland saluent un certain classicisme et une certaine idée de la ligne claire, tant ce créateur semble courir depuis ses débuts vers une bande dessinée séminale assumant son charme rétro et nostalgique.
Quelque part entre la poésie de Jacques Tati et le rocambolesque du Hergé de Jo, Zette et Joko, Stanislas reste un auteur volontairement à contre-temps, même quand il dessine le monde moderne avec Tardi-Bouju dans Le Perroquet des Batignolles, ce que confirme sa dernière œuvre, La Fin du monde, aventure de deux enfants et d’un manchot tout droit échappé de Saint-Ogan. Une parenthèse d’ingénuité, où le père de Victor Levallois offre la quintessence de son esprit naïf, sublime hommage à une certaine bande dessinée farfelue en voie de raréfaction, mais comme son héros Toutinox, inoxydable.
Nicolas Trespalle
Informations pratiques
Rencontres Chaland,
du samedi 4 au dimanche 5 octobre,
Nérac (47).