Avec cette somptueuse somme, Daniel Clauzier et Maud Piderit proposent une précieuse déambulation littéraire dans la capitale de la Vienne et ses alentours, embrassant, de l’Antiquité à nos jours, un héritage architectural à la beauté insoupçonnée.
Mondialement réputée pour la munificence de son patrimoine religieux, où le style roman se taille la part du lion, Poitiers offre une richesse architecturale inouïe à qui s’en donne la peine. Nullement ostensible, elle n’est le fruit du hasard. Au XIIe siècle, Aliénor d’Aquitaine fit de la luxueuse Limonum une des cours les plus raffinées de France. Son université, fondée en 1431, accueillit René Descartes, Joachim du Bellay ou François Rabelais. Enfin, sa situation géographique l’imposa comme un carrefour naturel d’échanges.
À travers les âges
Historien d’art, Daniel Clauzier, accompagné de la photographe Maud Piderit, a choisi pour le livre Belles demeures de Poitiers une traversée du temps. De l’époque romaine au XXIe siècle, ce découpage chronologique ne souffre aucun déséquilibre tant la ville a su, malgré les vicissitudes, conserver par strates de remarquables exemples d’habitation depuis le Moyen-Âge. Ainsi, le nombre de façades à pans de bois y est impressionnant, surtout autour de la collégiale Notre-Dame-la-Grande.
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Toutefois, l’un des modèles les plus représentés, depuis le XVe siècle, est bien celui, d’inspiration parisienne, de l’hôtel, qui, de la Renaissance aux années 1930, s’est inscrit dans le paysage urbain pictavien, particulièrement dans le Plateau. Et c’est là que la magie de l’ouvrage agit : poussant les portes et offrant au regard des trésors méconnus, des jardins cachés, une abondance de raffinement, des chefs-d’œuvre artisanaux (vitraux, lambris, parquets, ferronnerie, grillage, sculpture, mosaïques, encorbellements, marqueterie, etc.).
Une variété d’influences
En outre, cette recension érudite, mais toujours accessible et fascinante, ne se limite pas à la ville « historique », musardant à Biard, Buxerolles, Ligugé ou Saint-Benoît. Logis de la Grand-Barre, hôtel Fumé, hôtel Couturer, hôtel de Vallois, hôtel Vétault, hôtel Barbault de la Motte, maison des Atlantes, la « folie » Puy Mire, maison Ferdinand Briaud, villa San Martino, maison Notre-Dame, La Mérigotte, maison Ulysse Texier de la Caillerie, Le Clapotis, immeuble Fraillon, maison Parotin, cité des Castors, maison Yvan Gallé, villa Brès, maison Paul Bonnin, maison Marie Baranger, maison 10×10… autant de gestes uniques, portant les traces d’architectes ouverts aux influences ; y compris californiennes après la Seconde Guerre mondiale. Et des visions insufflées par de riches commerçants, des magistrats, des capitaines d’industrie, mais aussi des artistes ou des esprits épris de beau.
En centre-ville ou dans les faubourgs, en bord de Boivre ou avec vue sur le Clain, Belles demeures de Poitiers invite non seulement à la (re)lecture, mais, plus que tout, à la contemplation et à la (re)découverte de ce corpus unique et singulier.
Marc A. Bertin
Informations pratiques
Belles demeures de Poitiers,
Daniel Clauzier (textes) et Maud Piderit (photographies)
avec la collaboration d’Élisabeth Morin Chartier,
La Geste