À Rochefort, le plasticien et plongeur breton Nicolas Floc’h trouble les lignes entre peinture monochrome, peinture de paysage et photographie documentaire.

Nicolas Floc’h, photographe, plasticien et plongeur, né à Rennes en 1970, capture les images des eaux sous la surface, à la recherche de leur couleur. Sa double exposition accueillie à la Corderie Royale de Rochefort exploite à la perfection la forme allongée du bâtiment.

« Pigments flottants, dynamiques et libres »

La première série qu’il présente s’intitule « La couleur de l’eau – Charente ». De loin, à tort, on pourrait la prendre pour une succession de monochromes organisés en dégradé. En réalité, chacune des photographies a été prise à un point différent du fleuve Charente, de l’amont vers l’aval, depuis Tonnay-Charente jusqu’au pertuis d’Antioche, bien au large, toujours dans la limite de la zone dite « photique », celle qui reçoit de la lumière.

La teinte dominante que prend l’eau en mouvement varie en fonction de sa charge en matières minérales et organiques, et de sa teneur en « bloom » phytoplanctonique, cette efflorescence verte chargée de chlorophylle. Apparaissent ainsi les signatures spécifiques de chaque environnement, et le cours d’eau devient une ligne lumineuse. « Cette couleur est celle du microscopique qui devient visible par accumulation », résume l’artiste sur un cartel, avant d’évoquer les « pigments flottants, dynamiques et libres, dont la saturation augmente avec la profondeur ».

Sentiment de perdition

Créant un fort contraste, Nicolas Floc’h expose en parallèle une série en noir et blanc : « Initium maris » (traduit du latin : le début de la mer, ou au début la mer), un aperçu de « Paysages productifs », sa production photographique de documentation des côtes françaises, de la Bretagne au golfe de Gascogne. Les photographies sont prises en lumière naturelle, au grand-angle. Les tirages dévoilent des décors fantastiques, dignes de gravures fixant l’imaginaire d’un Jules Verne sous les mers. Le choix du noir et blanc — outre la référence à l’évolution de l’art de la photographie de paysage — accentue le sentiment de perdition et d’irréalité.

Nicolas Floc’h crée la confusion entre photographie documentaire et abstraction. S’adressant au visiteur en vidéo projection, il prévient : « On pourrait croire qu’il s’agit d’un dessin, d’une peinture, mais c’est une photographie. » Et concède : « Évidemment, tout ce travail renvoie à l’histoire de l’art, à l’histoire de la peinture. »

Guillaume Gouardes

Nicolas Floc’h,
jusqu’au dimanche 4 janvier 2026,
Corderie Royale, Rochefort (17).