Du 6 mai au 16 novembre 2025, le Musée d’Aquitaine présente une dense et enrichissante exposition temporaire , « Le monde d’après, 1944-1954. Des lendemains qui chantent ? », consacrée à la décennie post-Libération.
Dans les couloirs du Musée d’Aquitaine, les techniciens s’activent, cadres en bois et balais à la main. L’heure de l’inauguration de la nouvelle exposition, « Le monde d’après, 1944-1954. Des lendemains qui chantent ? », approche. Ce mardi 6 mai, après six mois de fermeture pour travaux, le musée rouvre ses portes avec ce nouvel accrochage qui représente une première puisque qu’aucun musée d’histoire en France n’avait évoqué cette décennie.
Au bout du tunnel
Idées principales de l’exposition : la commémoration de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe certes, mais aussi « la façon dont les idées de la Résistance ont permis de construire la société d’après-guerre », comme l’explique Romain Wenz en préambule de la visite. Ce dernier est responsable du centre national Jean Moulin, organisme portant cette exposition présentée jusqu’au 16 novembre au Musée d’Aquitaine.
Mais avant le monde d’après, il faut passer par le couloir de la guerre, pour se souvenir. Du rationnement, de l’exode, de la propagande. Au bout du tunnel mis en place pour accueillir les visiteurs et les plonger dans cette atmosphère étouffante de guerre, une carte postale datée du 8 mai 1945 porte déjà un timbre et une estampille (le cachet de la poste) portant les symboles de la France libre.
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Dans un parcours chrono-thématique, les différentes pièces soulèvent des questionnements propres à l’époque pour certains, encore d’actualité pour d’autres, de l’héritage de l’occupation à la place de l’enfant en passant par la santé publique. Par exemple, comment immatriculer les citoyens dans les registres de la Sécurité sociale, sans rappeler le système de marquage nazi ? Certaines interrogations restent donc ouvertes, là où d’autres sont explicitées de façon pédagogique. Des thématiques aussi nourries par la réflexion du visiteur, puisqu’il est invité à voter sur une question renouvelée chaque mois par le musée. Ce mois-ci : « L’histoire peut-elle éclairer l’avenir ? »
Forte de 308 objets, l’exposition propose des mises en scène travaillées dont une salle aux murs et au sol noirs, représentant le tribunal de justice. Deux rangées de chaises font face à l’image du procès d’Oradour-sur-Glane. Sur une porte de prison, des messages de fierté et d’espoir ont été gravés par les victimes de la Gestapo. Le visiteur reconstitue pièce par pièce le moment de l’épuration.
La marche du progrès
L’exposition retrace aussi la trajectoire de Bordeaux et de la région durant ce temps de transition, avec entre autres l’arrivée d’une figure tutélaire Jacques Chaban-Delmas, dont le bureau trône en majesté dans la scénographie. Les changements urbains au niveau des quais et du port ou encore les violents incendies ravagent le paysage en 1949 sont aussi évoqués. Une actualité et des chambardements illustrés en grande partie par des photos d’archives tirées d’un quotidien fondé dès la Libération et toujours quelque peu méconnu : Sud Ouest.
Misant sur l’immersion, l’exposition propose un parcours agrémenté de musiques de l’époque. Après la pénurie, le retour à la vie normale : dans une cuisine au mobilier Formica, dans laquelle les visiteurs pourront faire tourner un moulin à café grinçant, Boris Vian chante sa Complainte du progrès. La mécanisation investit le monde agricole, notamment sous l’impulsion du plan Marshall, marquant le début des Trente Glorieuses.
Mais déjà, une nouvelle ère géopolitique s’ouvre avec la guerre d’Algérie qui se profile. En visionnaire qu’il a toujours été, Boris Vian revient à nos oreilles avec sa chanson Le Déserteur, sonnant la fin d’une décennie de transition entre deux époques clés de notre pays.
Athéna Salhi
Informations pratiques
« Le monde d’après, 1944-1954. Des lendemains qui chantent ? »,
Jusqu’au 16 novembre 2025,
Musée d’Aquitaine