Le café Mancuso, premier établissement audiophile de France a fêté ses cinq ans, survécu à deux années de pandémie, et revisité sa carte vers des sommets gastronomiques.

 Hâtivement cataloguée comme abreuvoir à yuppies et/ou bobos, le café Mancuso, connue de quiconque goûte les musiques raffinées, souffrirait presque de ne pas être prise au sérieux pour sa table. Fâcheux tort qu’il faut réparer dans ce quartier bordelais de Saint-Paul, certes riche en bouclards, mais franchement pauvre en maisons de qualité.

Aussi, le Café Mancuso a fait appel à Luis Miguel Andrade, ancien chef du Clown Bar à Paris, passé auparavant chez Thierry Breton, Joël Robuchon et Philip Chronopoulos. Si le Portugais d’origine cap-verdienne, par ailleurs rompu aux arts visuels comme aux arts martiaux, n’est pas au piano – à la vue de la clientèle, cuisine ouverte oblige –, c’est bien lui qui conçoit la carte en fonction des saisons et des humeurs, laissant à la brigade le soin d’exécuter le plan à merveille.

Le café Mancuso, un havre de paix plus que bienvenu

En ce jeudi soir humide et froid, qui puait la déprime propre à notre époque, l’écrin cosy, la banquette tabac, les lumières douces et la sélection MPB et soul d’un DJ catalan offraient subitement un havre de paix plus que bienvenu.

Cependant, nullement venu pour combattre le spleen ni soigner le cœur grenadine, il fallait honorer l’invitation. Toute sagesse, impasse sur les amuse-bouche qui faisaient de l’œil tel ce jambon Kintoa. En entrée, un trésor de saison : la Saint-Jacques (14 €), saisie à la perfection, avec potimarron croquant sous la dent, relevé d’exquises notes de sudachi, agrume japonais acide.

Rien à dire, si ce n’est encore !

Rien à dire, si ce n’est encore! Faisant maigre avant l’heure, on a jeté notre dévolu sur le poisson du jour (24 €) : du lieu jaune, cuit avec délicatesse, accompagné de pommes de terre et d’une remarquable sauce à base de câpres. Remarquant notre passion pour la mer, le patron sauva l’ultime tartare de bar de ligne (15 €), simplement servi avec de fines lamelles de radis, des œufs de truite et une sauce soja relevée au cédrat. Là aussi, chapeau bas.

Certains commensaux eurent le privilège de déguster un tartare de bœuf Angus (22 €) maturé, jaune d’œuf confit, chou-rave, passé à la mandoline, et pommes grenaille. Vu l’assiette immaculée au bout de cinq minutes, gageons que c’était au-delà de «bon».

Pas un dessert, une expérience à laquelle il faut céder

Enfin, vivement encouragé par notre hôtesse, aussi exigeante que gourmande, le Très chocolat (9 €) a conclu le débat. Cacao à très haute intensité, copeaux de noix de coco, beurre demi-sel, texture crémeuse et tiède à la périphérie, fondant de malade en son centre. Ce n’est pas un dessert, mais une expérience. Enfin, plutôt une tentation, à laquelle il est impossible de ne pas céder.

Et avec ce festin, que boit-on? Direction l’Autriche avec un Puszta Libre! 2020 (33 €), vin rouge naturel et biodynamique, élaboré par Claus Preisinger dans la région du Burgenland, au bord du lac Neusiedl. Une partie de la tablée ayant fait sédition, la carte courte des cocktails a été intégralement passée en revue : Old Fashioned (10 €) vif et tonique, Negroni (10 €) subtil, Moscow Mule (10 €) et Jamaican Mule (10 €) twistés à la fleur d’hibiscus séchée, et, avant de filer au paddock, une Margarita on the rocks (10 €) étonnamment acidulée.

Boudoir sonore pour diggers exigeants

Si la sélection de vins biodynamiques et naturels est étoffée, on déplore toutefois le peu de quilles bordelaises ; au verre, compter entre 6 et 8€. Côté spiritueux, whisky et bourbon dominent la carte, mais cette dernière est fort sérieuse ne serait-ce que par la présence d’un calvados 5 ans d’âge et du pastis de Nice.

Au sous-sol, possibilité de privatiser la table d’hôte pour une vingtaine de personnes avec système son de luxe, service traiteur assuré par le chef, et même une table de ping-pong pour revivre les riches heures de Secrétin-Purkart.

Enfin, à l’usage des diggers exigeants, le boudoir sonore propose à la vente comme à l’achat, du lundi au vendredi, entre 14h et 20h, et le samedi, entre 12h et 20h, un vaste choix de 33 tours, neufs comme d’occasion; le nom de l’établissement ne rend pas hommage au fondateur du légendaire Loft pour des prunes… 

Marc A. Bertin

Informations pratiques

  • Café Mancuso
  • 24, rue Ravez 33000 Bordeaux
  • Réservations : 09 87 12 38 15.
  • Du lundi au vendredi, 17h30-1h. Samedi, 12h-1h.

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