À Limoges, la Fondation d’entreprise Bernardaud célèbre les 160 ans de la maison avec l’exposition « 1 400 °C. Porcelaine et moi, émois  » dédiée à la porcelaine.

Passé un certain âge, faut-il encore compter ? Voire célébrer ? La Maison Bernardaud figure parmi les plus prestigieuses manufactures, dont l’inestimable et respecté savoir-faire a depuis longtemps dépassé le strict cadre des arts de la table ; bijoux et arts décoratifs font partie de son vocabulaire.

Depuis 20 ans, sous l’impulsion de Michel Bernardaud, la maison limougeaude peut s’enorgueillir d’une fondation, qui, outre la possibilité de visiter les ateliers tout au long de l’année, propose une exposition thématique estivale, ouverte à la création contemporaine s’emparant évidemment de la céramique et de ses trésors : la poterie (ou terre cuite), le grès, la faïence et la porcelaine. Point notable de cette démarche : ne pas représenter le même artiste (sur une période de dix ans) et ne pas exposer des œuvres déjà montrées en France.

La Maison Bernardaud fête ses 160 ans

Facétie du calendrier, en 2023, la Maison Bernardaud a 160 ans et sa fondation d’entreprise 20 ans ! Aussi, pour ce double anniversaire, le choix s’est porté sur une seule céramique, en lieu et place de l’ensemble de la famille généralement présentée. Donc, ni terre cuite, ni faïence, ni grès… Gloire à la porcelaine !

Commissaire de l’exposition, Frédéric Bodet a convié Caroline Andrin, Carole Chebron, Claire Curneen, Gundi Dietz, Louise Hindsgavl, Irene Nordli, Marieke Pauwels, Perezalba Red, Alison Shanks, Mariëtte van der Ven et James B. Webster.

La porcelaine, un or blanc chauffé à 1 400 °C

Le titre énigmatique pour tout néophyte indique la température — 1 400 °C — où se révèle la matière. En effet, à ce stade, la porcelaine, seule céramique à supporter autant de degrés, est cuite durant 24 heures, dévoilant ainsi toutes ses qualités : résistance, inaltérabilité, durabilité, imperméabilité, translucidité, finesse et blancheur.

Nature morte — Mariëtte van der Ven

D’ailleurs, ne parle-t-on pas d’« or blanc » ? Exigeante, voire capricieuse, la porcelaine s’avère revêche à la contrainte, seul le feu sait la dominer. À 1 400°C, elle réduit d’environ 14 % et se déforme.

Onze artistes internationaux

Les onze artistes internationaux s’en sont emparés, non sans péril tant cette matière « a la mémoire de ses erreurs », selon Frédéric Bodet. Sentiment partagé par le Britannique James B. Webster : « La porcelaine est fine, intime, elle a une douceur certaine et permet de nombreux détails... J’aime le mouvement de la matière. Il y a une permanence. En même temps, la porcelaine est un matériau difficile à travailler : pour chaque pièce terminée, il y en a probablement quatre qui n’aboutissent pas. »

Si le blanc domine par son éclat unique, le rouge sang-de-bœuf et le bleu de four s’invitent à la noce de ce banquet de sculptures plus charnelles qu’il n’y paraît. Et du banquet au mariage, il n’y a qu’un pas, franchi par Caroline Andrin avec son étonnant trousseau, Albescences pour « un nouveau rituel fictionnel ». « 1 400 °C. Porcelaine et moi, émois » ne ment pas sur son intitulé : le corps y est à la fête et le regard complice.

Marc A. Bertin

Informations pratiques

« 1 400 °C. Porcelaine et moi, émois »,
jusqu’au samedi 30 mars 2024,
Fondation d’entreprise Bernardaud, Limoges (87).

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