À Carbon-Blanc, en Gironde, la plasticienne Anne Moirier expérimente un statut inédit : celui d’artiste municipale à travers une résidence de recherche et des actions menées dans le cadre du programme Prismes.
Artiste municipale. L’expression fait mouche. Bien qu’imaginaire, Anne Moirier se saisit de ce statut truculent qui n’apparaît dans aucune des catégories d’agents de la fonction publique. « L’idée, précise la plasticienne passée par les Beaux-Arts de Rennes et ceux de Valence en Espagne, c’est de mettre l’artiste au même niveau que tous les agents municipaux et d’étudier les enjeux d’une telle incarnation. Ces enjeux portent aussi bien sur la place et le rôle de l’art dans la vie collective d’un territoire que sur la liberté de création. »
En effet, que devient la capacité de créer sans contraintes dès lors que l’artiste met son métier au service d’une collectivité ? Déjà présent implicitement dans les projets artistiques financés par les subventions publiques, ce système d’interdépendance est au cœur de la thèse de doctorat qu’Anne Moirier va débuter en 2024.
Anne Moirier dans le cadre du programme Prismes
Pour l’heure, on la retrouve à Carbon-Blanc où elle est accueillie depuis le mois de mars en résidence dans le cadre du programme Prismes porté par BAM projects. La plasticienne basée à Bordeaux y met à l’épreuve son statut d’artiste municipale à travers une série de performances baptisées « Services publics ».
Ces dernières émergent d’un mode opératoire précis. « Dans ma démarche, renseigne l’intéressée, je travaille toujours avec des problématiques saisies sur le terrain. Je travaille en collaboration avec les gens que je rencontre, j’emprunte leurs objets ou je déplace les activités qu’ils ont au quotidien. »
Actions collaboratives
Sur la commune de la métropole bordelaise, cette approche se concrétise place Mendès-France à travers six actions collaboratives. Trois d’entre elles ont déjà eu lieu. Le 15 septembre dernier, des résidents de l’Ehpad Les Jardins d’Ombeline partageaient leur séance quotidienne d’écoute et de débat autour des actualités parues dans le quotidien régional.
Le 27 septembre, les plaques d’œufs utilisées par les animatrices du Relais Petite Enfance donnaient lieu à un pharaonique « chantier de construction publique », composé d’une foultitude d’emballages en carton disposés à la manière des colonnes de Buren que les plus jeunes pouvaient réassembler à leur guise pour en faire cabanes, circuits et autres figures sorties de leur imaginaire.
Prochains rendez-vous de l’artiste municipale, le 6 décembre avec une ouverture d’atelier et ses trois dernières actions programmées d’ici à la fin décembre.
Anna Maisonneuve