Un nouveau livre et une exposition rétrospective lèvent le voile sur le monde intime de Dominique Duplantier, dessinateur unanimement reconnu pour la grande qualité de ses représentations de villes et d’architectures. Visite indispensable.
Dominique Duplantier est un homme du Sud-Ouest. Né à Bordeaux. Père landais. Mère bordelaise. « J’ai vécu à Pau avec mes parents, puis j’ai suivi des études d’histoire à Bordeaux. » En désir de « vadrouille », il s’inscrit aux Beaux-Arts de Paris, section gravure, en 1969. « J’ai eu la chance de rencontrer Georges Wolinski, qui a acheté des planches pour Charlie Mensuel », raconte-t-il, visiblement satisfait de préciser que « toutes ont été publiées ».
On retrouve son nom à l’affiche de « Drôle de solitude », exposition itinérante notamment présentée à Beaubourg. « J’étais aux côtés de Chaval, Reiser, Bretécher, Topor… Cela a fait partie des événements qui ont marqué mon père. Il y a vu une sorte de reconnaissance. » Au moment de partager son patrimoine, le paternel met à la disposition du jeune ménage Duplantier une grande maison sous les pins des Landes, dans le village d’Ondres. Loin des mondanités, qu’il semble haïr, et du réseau des galeristes, Dominique Duplantier y poursuit la maîtrise de son art et construit un univers fait de lignes, de mouvements et de fantasmagories.
Vue du ciel à main levée
En 1978, il est présenté à Claude Aubert, architecte bordelais amateur de ses dessins, par ailleurs chargé de la rénovation du quartier Saint-Pierre, qui lui en commande une représentation graphique. Duplantier accepte au culot. « Je n’avais jamais dessiné une maison de ma vie, mais j’étais un admirateur du plan Turgot, cet extraordinaire plan de Paris du XVIIIe siècle ! J’ai proposé d’en faire un équivalent. » Ainsi signa-t-il son premier plan axonométrique, une vue du ciel tracée à main levée, avec un saisissant effet de perspective. Le coup d’essai fut un coup de maître.
Le plan de Bayonne dans lequel il se lance ensuite conquiert édiles et public. Il est exposé au musée Bonnat et imprimé à grande échelle. Le téléphone retentit dans la demeure ondraise. Duplantier devient l’auteur attitré des emblématiques plans de cités encartés dans le magazine Géo, puis, à la tête de son atelier, livre des dizaines de planches pour les guides de voyage Gallimard. « On a littéralement sillonné la France, à bord de ma Renault Espace. »
Des plans de ville à l’absurde
Habitant aux portes du Pays basque, il en visite villes et villages et fait paraître aux éditions Cairn et Koegui ses ouvrages sur le patrimoine architectural du Labourd, de Basse-Navarre et de Soule. « Le livre sur Saint-Jean-de-Luz a été mon dernier, car j’ai eu un AVC alors que je travaillais dessus. Je me suis demandé si j’arriverais à le finir. Il m’a fallu tout réapprendre, patiemment. Le livre est sorti, mais ma carrière de dessinateur de ville s’est arrêtée là. »
Voilà Dominique Duplantier replongé dans ses dessins. Odile Contamin et Sophie Cazaumayou, deux historiennes qui l’ont tant accompagné dans son aventure éditoriale, entreprennent de réunir les pièces majeures de l’œuvre du reclus ondrais. Ce travail commun débouche sur la parution d’un ouvrage anthologique et sur l’exposition rétrospective programmée au Didam, l’ancien bâtiment des affaires maritimes de Bayonne, aujourd’hui dédié à la célébration des arts visuels. Sur les cimaises, les plans de Duplantier auront laissé place à l’univers absurde et onirique de ses grands dessins à la plume et à l’aquarelle. La création personnelle, longtemps occultée, d’un discret géant du dessin.
Guillaume Gwardeath
Informations pratiques
« Encre et aquarelle », Dominique Duplantier,
jusqu’au mercredi 21 avril,
Didam, Bayonne (64).
Encre et aquarelle, Dominique Duplantier, Éditions Koegui