Bercée autant par le folk-rock que la culture inuk qu’elle défend passionnément, l’artiste québécoise Elisapie nous offre trois dates régionales pour apprivoiser son univers.

Un jour, Elisapie Isaac reçoit une playlist pour rythmer son footing : ABBA, Cyndi Lauper, Queen… du tube inoffensif. Pourtant, elle éclate en sanglots à l’écoute. Nostalgie d’une jeunesse oubliée ? Chez l’autrice-compositrice-interprète québécoise, originaire du village de Salluit, village du Nunavik, ces titres revêtent une tout autre importance.

Fière représentante de la communauté des Inuits, elle se rappelle ces moments où, en beuglant des refrains de Metallica avec ses potes blancs, elle sentait s’effondrer le temps d’un court instant le mur invisible qui les séparait d’elle, la « sauvage », héritière d’un peuple nomade sédentarisé de force.

“Piller” le grand catalogue pop/rock

Sa revanche sera cette fois musicale : après avoir réalisé un documentaire engagé, milité pour la reconnaissance de la Journée nationale des peuples autochtones, reçu moult récompenses pour l’ensemble de son œuvre, elle décide de « piller » le grand catalogue pop/rock occidental et de l’adapter en inuktitut, sa langue maternelle. En résulte un quatrième album sublime, paru en 2023, le plus abouti de sa discographie.

Constitué uniquement de reprises de tubes planétaires (Blondie, Pink Floyd, Fleetwood Mac…), l’opus joue avec cette universalité en la passant par le filtre de la langue et de la culture natales d’Elisapie, qui en profite pour se reconnecter avec son héritage.

On y entend du qilaut, un tambour en peau de caribou, du katajjaq (chant de gorge inuk)… Les arrangements subtils et bruts du fidèle Joe Grass (collaborateur de Patrick Watson, entre autres) contribuent à l’éloigner des habituelles influences americana pour l’emmener sur le terrain d’une Björk plus acoustique ou d’une PJ Harvey apaisée. L’écrin parfait pour libérer toute la force de son chant hypnotique. La plus belle des revanches, donc.

Benjamin Brunet

Informations pratiques

Elisapie,
jeudi 11 avril, 18h,
Des Lendemains qui Chantent, Tulle (19).

samedi 13 avril, 20h30,
Le Cuvier de Feydeau, Artigues-près-Bordeaux (33)

dimanche 14 avril, 18h,
Les Abattoirs, Cognac (16)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *