Jusqu’au 7 décembre, la Vieille Église, à Mérignac, invite à la liesse à la faveur « etat(s) de fête », exposition pluridisciplinaire consacrée à ce temps suspendu, sel précieux de l’existence.

Alors que chaque jour, la France Potemkine s’enfonce plus que de raison dans l’abjection, le service culturel de la Ville de Mérignac ose un salutaire pas de côté en ouvrant grand les cimaises de sa Vieille Église à ce que le génie humain a su produire de mieux depuis qu’il a compris que la chouille, c’est la vie.

Avec pas moins de 26 artistes, locaux ou internationaux, émergents ou établis, « État(s) de fête » essaie de cartographier tout le spectre du genre, de l’allégresse à l’exubérance, de la liesse à la fatigue, de l’extase à l’hébétude, de l’évanescence à l’éphémère, de la nostalgie à la liberté. L’ambition étant d’envisager cette thématique supposément légère comme un véritable « temps de respiration ».

 » Une place au partage « 

Citant Simone de Beauvoir — « la fête est avant tout une ardente apothéose du présent, en face de l’inquiétude de l’avenir » —, Anne Peltriaux et Corinne Veyssière, les têtes pensantes des arts au mur artothèque de Pessac, ont amoureusement pioché dans les collections des 3 FRAC néo-aquitains ainsi que dans celle de leurs homologues du Calvados de L’Artothèque-Espaces d’art contemporain de Caen. Précisant le propos, Anne Peltriaux souhaitait un commissariat ne réduisant nullement « la fête qu’au divertissement, mais accordant une place au partage comme au lien entre générations ».

En 5 séquences, empruntant leurs titres aussi bien à Julien Clerc qu’à Patti Smith, le parcours oscille entre photographies, installation et vidéo. Couleurs saturées, noir et blanc charbonneux, petits ou grands formats, tout ici documente la parenthèse enchantée, l’état d’âme, parfois second.

Prendre part à l’écriture de l’oeuvre

Du monumental Lobsters and Oysters, Please! (2023), réplique en céramique d’un fastueux banquet, aux splendeurs du maître Jean Dieuzaide, extraites de la série Voyages en Ibérie (1951-1953), de Bend It (1981), tiré du film The World of Gilbert & George, où le couple star de l’art contemporain britannique interprète une danse de salon entre Monty Python et David Byrne au rythme de la sucrerie pop de Dave Dee, Dozy, Beaky, Mick & Tich, à l’intimité des clichés (retrouvés et manipulés) de Cédric Calandraud dans la série France 98 (2016-2018), des sublimes sérigraphies Rolling Stones Rock-prints (1973-1974) de la comète Robert Malaval (1937-1980) à l’élégant chaloupé Danser le twist (1965) de l’immense Malick Sidibé, des potaches Cadavres (1997) de Frédéric Latherrade au dernier été du XXe siècle, Été 99 (2024) d’Ange Leccia, des Thés dansants à travers la France (2024) de Julie Glassberg à l’inventaire des façades des défuntes discothèques, After Party (2013-2018) de François Prost, « État(s) de fête » déambule, titube parfois, au gré des humeurs ; l’euphorie le disputant à la mélancolie.

Et parce que la java/la noce/la Bamba/la nouba/la teuf rime avec partage, Geörgette Power convie, avec Lendemain qui chante (2015), le public à prendre part à l’écriture de cette œuvre via une collecte bimensuelle de textes adressés par e-mail ou bien écrits à la main dans un cahier.

« Get ready tonight/Gonna make this a night to remember/Get ready (Oh, baby) tonight/Gonna make this a night to remember. » Toujours écouter les conseils de Shalamar…

Marc A. Bertin

Informations pratiques

« État(s) de fête »,
jusqu’au dimanche 7 décembre,
Vieille Église, Mérignac (33).