À l’honneur de l’artothèque de Pessac, la dessinatrice Louise Aleksiejew plonge le public dans les abîmes de la connaissance avec l’exposition « LA COULEUR DES DINOSAURES »
Le titre de l’exposition a la saveur d’une question enfantine, mais ô combien fondée. Animait-elle les têtes pensantes de l’artothèque de Pessac, Anne Peltriaux et Corinne Veyssière ? Qui sait ? Quoi qu’il en soit, ces dernières ont eu un tel coup de cœur lors du Salon du dessin de Paris, en 2023, que non seulement elles ont fait l’acquisition d’une œuvre de Louise Aleksiejew pour la collection de l’établissement, mais qu’en outre, elles l’ont conviée dans la cadre d’une création d’exposition — dispositif initié depuis 2005 et soutenu par la DRAC Nouvelle-Aquitaine.
De Robin des Bois aux dinosaures
Née en 1994 à Caen, diplômée de l’école supérieure d’arts et médias de Caen, passée par Paris VIII, désormais établie à Montreuil, la Normande enseigne le dessin à l’ÉESI d’Angoulême. Son travail a fait déjà l’objet d’expositions personnelles et la plasticienne, qui, à l’occasion, collabore avec son homologue Antoine Medes, est dorénavant représentée par la galerie Bernard Jordan.
Fille cachée de d’Alembert et Diderot, l’enthousiaste trentenaire confie avoir été marquée à vie par l’exercice de l’exposé. Depuis, elle « consulte les encyclopédies de manière empirique ». Une gymnastique intellectuelle imprégnant sa création où fourmillent non seulement le questionnement mais aussi la spéculation.
Et, autant dire que Louise Aleksiejew a plus d’une interrogation dans son sac. Ainsi, la série « P.O.V », remarquable ensemble de dessins exécutés aux crayons de couleur avec une palette de 5 nuances ou « comment construit-on les connaissances» ? Vaste sujet abordant les thèmes de la représentation, de la transformation, de la narration. Inventions, découvertes, faits, tout y passe : de la peste de Justinien à Kate Bush période Wuthering Heights, du manga Detective Conan à la découverte de l’Amérique, de Robin des Bois aux dinosaures… Une fascinante réflexion sur l’impermanence du savoir.
« Je suis une éponge et transforme tout ce que je peux absorber »
En regard, « La complexité », série sur la construction de la connaissance depuis les imagiers de l’enfance afin de comprendre le monde. Quatre grands panneaux au Rotring® formant une espèce de dictionnaire personnel dénué de hiérarchie. « Je prends des éléments pour mieux détourner le chemin tracé par l’encyclopédie, qui est une construction humaine tout sauf neutre. »
Toutes les choses sont mêlées les unes aux autres contrairement au principe de classification. Ces dépôts, sans logique ni évidence, constituent une pinacothèque intime entre mythologie, Scooby-Doo, bestiaire, Golden Girls… « Le système digestif est symbolique de mon travail. Je suis une éponge et transforme tout ce que je peux absorber. Le flux perpétuel de pensée entre choses acquises et spontanées. »
Une exposition accessible aux enfants

Enfin, « Danse macabre », fresque murale de 4 dessins agrandis — en fait des « commandes » passées à son entourage. Résultat ? Un bal de squelettes aux codes graphiques différents, loin de la leçon d’anatomie, plutôt des souvenirs de représentation. « Je suis une dessinatrice qui fait du volume. Je rêve de construire une immense camera obscura. Ici, je n’ai pas le sentiment d’honorer une commande. Je voulais que cette exposition soit accessible à tous, aux enfants notamment. Le dessin, c’est ma vie. »
Marc A. Bertin
Informations pratiques
« La couleur des dinosaures », Louise Aleksiejew,
jusqu’au mardi 25 mars 2025,
Les Arts au Mur – Artothèque, Pessac (33).
Week-end Musées Télérama,
samedi 22 et dimanche 23 mars 2025, 14h-18h.
Visites flash familles, goûters, visite « Un autre regard » avec Éric Dépré, paléontologue autodidacte et collectionneur passionné.