Duo romantique
En la personne de Léo Margue, plaçons cette chronique sous le signe de la jeunesse et du contemporain, puisque ce jeune chef d’orchestre, né en 1990, a repris depuis deux ans les rênes de 2e2m, l’un des plus augustes ensembles dédiés à la création.
Il sera en novembre le chef invité par l’Orchestre du Pays basque pour trois concerts qui n’ont rien à voir, consacrés à une sacrée paire de tubes romantiques. D’un côté, le Concerto pour violon n° 1, dont le lyrisme virtuose et la tendresse brahmsienne éclipsent tout le reste de la production de l’Allemand Max Bruch (1838-1920) : dédiée en 1868 à Joseph Joachim, l’œuvre sera ici interprétée par le violoniste français d’origine sud-coréenne Da-Min Kim. De l’autre, la Symphonie n° 5, dite « du Destin », composée en 1888 par un Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893) qui commençait tout juste à croire de nouveau en lui, après un divorce qui l’avait laissé exsangue… Deux œuvres gonflées d’émotions comme des voiles, qu’on compte sur Léo Margue pour nous rendre encore plus enivrantes.
Debussy extime
Voilà déjà vingt ans que le pianiste français François Dumont et la soprano irlandaise Helen Kearns aiment à se retrouver autour de programmes joyeusement buissonniers. En l’occurrence, à la fin du mois, au Théâtre de Brive, en association avec le Festival de la Vézère.
Loin de se cantonner au Paris fin de siècle et à l’auteur du Prélude à l’après-midi d’un faune, leur « Cabaret Debussy » va et vient entre la Ville-Lumière et les néons de New York. L’espace d’une soirée, Le Chat noir, fameux cabaret de Montmartre où Satie cachetonnait au piano, côtoie l’Alvin Theatre, salle de Broadway où cartonna Porgy & Bess, l’opéra « racisé » de George Gershwin, en octobre 1935. Et le swing de Cole Porter, les airs sur lesquels virevoltaient Fred Astaire et Ginger Rogers, font écho à quelques décennies d’écart au recueil Children’s Corner : ces pages pour piano que Claude Debussy (1862-1918) dédia à Claude-Emma, dite Chouchou, sa fille adorée, sont tout simplement parmi les plus sublimes de la littérature pianistique. Un univers que François Dumont connaît intimement, puisqu’il fait paraître ces jours-ci, sur le label La Música, le CD Clair de lune ; le premier enregistrement jamais réalisé sur le piano Blüthner du compositeur.
MÀDisfaction
5 ans, déjà, que le festival MÀD a été initié par le valeureux ensemble Proxima Centauri, pour mettre en avant « la vitalité des musiques d’aujourd’hui ». L’épicentre de ces six folles journées (du 21 au 26/11) est un « jour de fête » au Théâtre des Quatre Saisons de Gradignan, où se croiseront, le temps d’une après-midi dominicale et de cinq créations mondiales, le tubiste Pascal Rousseau, le collectif sévillan Taller Sonoro et l’Ensemble MÀD : 15 musiciennes et musiciens de Nouvelle-Aquitaine réunis pour l’occasion, dans un programme superlatif – avec notamment l’ébouriffant Professor Bad Trip, Lesson I (1998) de Fausto Romitelli ; sous la baguette de Guillaume Bourgogne, chef attitré de deux excellentes formations vouées à la musique contemporaine, Cairn et op. cit.
L’une des grandes vertus du MÀD – pour « Musiques À Découvrir, Défendre, Déguster, Diffuser », etc. –, c’est aussi de contribuer à la vitalité de la scène régionale. Les compositeurs acousmates du collectif Octandre, les élèves du PESMD se croiseront lors de ces cinq journées qui, le reste du temps, se tiendront à Bordeaux.
« L’histoire oubliée des femmes compositrices »
Au marché des Douves, on pourra notamment faire connaissance des deux compositrices et trois compositeurs de MIXTE, académie de création musicale dédiée, tous les deux ans, à cette musique qui associe instruments et traitement électronique. Au Conservatoire, Guillaume Kosmicki retracera « l’histoire oubliée des femmes compositrices » avec la culture généreuse qu’on connaît, et la complicité des élèves musiciens.
Enfin, au cinéma Utopia Saint-Siméon, on ne ratera pas la projection du film de Jérôme Florenville, Une autre écoute est possible, consacrée à l’histoire des Centre nationaux de création musicale, dont le premier – La Muse en circuit – fut créé par Luc Ferrari (1929-2005) : de Heiner Goebbels à Nina Garcia, du théâtre musical à l’électronique, la diversité d’esthétiques qui s’y côtoient dit assez combien ces Centres – aujourd’hui au nombre d’une dizaine dans l’Hexagone — exercent une action à la fois exemplaire et salutaire. Comme si, 20 ans après la mort de celui-ci, ils transmettaient quelque chose de la folle liberté du poète-compositeur qui les a portés sur les fonts baptismaux…
David Sanson
Informations pratiques
« Bruch – Tchaïkovski – Destins croisés », Orchestre du Pays basque, direction :Léo Margue, violon : Da-Min Kim
vendredi 15 novembre, 20h,
salle Tanka – Centre Culturel Peyuco Duhart, Saint-Jean-de-Luz (64).
samedi 16 novembre, 20h,
Le Connecteur, Biarritz (64).
dimanche 17 novembre, 17h,
cinéma Saint-Louis, Saint-Palais (64).
Cabaret Debussy, piano François Dumont, soprano Helen Kearns,
mardi 26 novembre, 20h,
Théâtre de Brive, Brive-la-Gaillarde (19).
MÀD festival,
du jeudi 21 au mardi 26 novembre,
Bordeaux (33) et Gradignan (33).