Nouvelle sélection des expositions à ne pas rater en Nouvelle-Aquitaine. Ce mois-ci direction Tarbes, Marmande, Orthez et Rochechouart.
Le Parvis à Tarbes dans les « brumes »
Sculpteur, dessinateur, aussi habile avec le bois, le bronze, le ciment que le fusain, le crayon et le papier mâché, Laurent Le Deunff navigue sans hiérarchie ni dogme, entre noblesse et prosaïsme des matériaux comme des formes. Piochant dans un répertoire de formes liées à la nature et à l’animalité, le natif de Talence constitue depuis de nombreuses années un insolite bestiaire, constitué de chats, de hiboux, de castors, d’escargots ou de limaces ; héros ordinaires peuplant nos paysages et jardins.
Au Parvis, le plasticien s’amuse à faire entrer pour la première fois le dehors dans le dedans par l’apparition saugrenue d’un sous-bois envahi par la brume d’un matin d’hiver. Plongées dans la pénombre, diverses sculptures animalières se dévoilent au fur et à mesure de l’apparition, puis de la disparition, de l’épais brouillard. Au fond de l’espace, un terrier à taille humaine cache peut-être un animal inféodé au monde souterrain ?
Si cette exposition puise ici dans l’enchantement du couvert d’une forêt traversée d’ombres et de lumières, elle n’est pas seulement l’expression d’une nostalgie romantique, mais plutôt la revendication de la préoccupation écologiste de son auteur.
- L’expo : « La grisaille persiste encore, avec toutefois une possibilité d’éclaircies. », Laurent Le Deunff, jusqu’au samedi 10 mai, Le Parvis — Centre d’art contemporain, Tarbes (65).
Les visions de Yan Bernard à Marmande
En biologie, un mutagène est un agent qui modifie le patrimoine génétique et provoque des mutations permanentes. Ici, en écho à la ville de Marmande, aux collections du musée et en particulier aux œuvres d’Abel Boyé, il ne s’agit pas de mutants, mais plutôt de glissements, de transformations et de réinterprétations.
Yan Bernard est venu à plusieurs reprises à Marmande pour recueillir du matériel de recherche, des photographies, vidéos et observations qui ont permis de définir des points d’ancrage pour la création d’œuvres. À travers cette démarche, le plasticien, diplômé de l’école des beaux-arts d’Angers en 2022, tisse un lien entre ses préoccupations artistiques et celle de Marmande, du musée Marzelles et de ses espaces d’exploration, pour poser un regard neuf et révéler ce qui passe parfois inaperçu, mais qui, vu de l’extérieur, peut éclairer le territoire et son époque.
Une partie des œuvres s’appuie donc sur le patrimoine de la ville : des paysages marmandais, un groupe statuaire du XVIIe siècle, et bien sûr le travail d’Abel Boyé, qui ont donné l’occasion à Yan Bernard de revisiter des thèmes classiques comme le paysage, le portrait, la statuaire, tout en interrogeant notre rapport contemporain à la figuration.
- L’expo : « Mutagène », jusqu’au samedi 17 mai, Musée Albert Marzelles, Marmande (47).
Place à l’info au centre d’art image/imatge à Orthez
Né en 1992, diplômé de l’école des beaux-arts de Bordeaux en 2017, Harilay Rabenjamina vit et travaille à Paris. Son travail a notamment été présenté au Palais de Tokyo (Paris), à Lafayette Anticipations (Paris), aux Rencontres de la photographie (Arles), au Peach (Rotterdam) et au CAPC musée d’art contemporain de Bordeaux.
Son travail prend la forme de photographies, de films, d’installations, de performances ou de compositions musicales. Cette pluralité lui permet d’investir différents registres d’image et de narration (télévisuelle, cinématographique, médiatique, décorative). À la manière d’un pastiche, son travail emprunte à des images et des genres dont il rejoue les codes avec humour et hommage.
Avec « Montagem » , que l’on pourrait traduire par montage, ensemble ou mix en portugais, Harilay Rabenjamina met en regard deux activités, celle de l’artiste et celle du journaliste : comment ces deux figures créent, produisent et montent de toutes pièces des visions du monde dans lesquelles le principe d’impartialité et la subjectivité sont mis en tension.
Dans cet appartement, on retrouve une multiplicité de présences : des œuvres d’artistes invités ainsi que des objets, des textes, des images, de la musique. Des éléments de nature hétérogène meublant et habitant l’espace, tous médiatisés par le geste décoratif de celui qui y vit.
- L’expo : « Montagem », Harilay Rabenjamina, jusqu’au samedi 7 juin, image/imatge, Orthez (64).
Grande première au Musée d’art contemporain de Rochechouart
Née en 1993, à Jaljulia, Aysha E Arar est une artiste palestinienne pluridisciplinaire. Peintre, dessinatrice, poétesse, vidéaste et performeuse, elle s’empare des contes et légendes du monde palestinien pour les relire à l’aune du temps présent. Face à l’impossibilité de représenter la tragédie actuelle, elle développe un langage métaphorique et onirique, adoptant un trait de dessin vif et spontané, qui se déploie sur tout type de support, imaginant un univers où les corps réels et rêvés s’entremêlent, où les différentes espèces cohabitent en harmonie.
À Rochechouart, Aysha E Arar déploie un ensemble d’œuvres qui sont autant d’odes à l’amour et à l’espérance. Elle s’approprie l’univers féérique du château pour penser un monde d’émancipation face aux forces coloniales et patriarcales, comme en témoigne le dessin mural de la première salle.
Le parcours se poursuit avec la présentation de la vidéo d’animation Amphibia, dans laquelle l’artiste incarne une sirène luttant pour les droits des femmes. Une salle est ensuite consacrée à un ensemble d’œuvres sur linceuls et forme un espace de recueillement au cœur de l’exposition.
Le parcours s’achève par la monstration d’une toile de près de 18 mètres de long réalisée en écho aux salles des fresques Renaissance avoisinantes, déployant de manière monumentale le potentiel narratif de son travail.
- L’expo : « La princesse du pays des oliviers », Aysha E Arar, jusqu’au dimanche 8 juin, Musée d’art contemporain de Rochechouart, Rochechouart (87).
Junkpage