Jamais en manque d’introspection, le Capc musée d’art contemporain, à Bordeaux, présente un nouveau récit de ses collections, cette fois-ci en évoquant la biodiversité et la matière vivante, présentes sous bien des formes.
Force est de constater que le Capc musée d’art contemporain de Bordeaux a un certain sens du timing. Dernière preuve en date, l’éclosion de sa nouvelle exposition baptisée « Pollen » à l’arrivée du printemps. Un clin d’œil saisonnier qui cache une proposition s’inscrivant dans le temps long. En effet, « Pollen » est le troisième épisode des récits de collections, entamés avec le « Tour du jour en quatre-vingts mondes » et poursuivis lors d’« Amour systémique ».
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Ici, les 35 œuvres, dont cinq en prêt, provenant du travail de 29 artistes, sont liées par une thématique commune : celle de la biodiversité, du vivant et de notre rapport à l’environnement. Un questionnement ayant lieu à l’extérieur mais aussi à l’intérieur d’un musée ; institution luttant en permanence pour empêcher les œuvres de s’altérer. Toutefois, certaines choses sont inévitables comme le prouve le changement de couleur du Pollen de noisetier récolté et enfermé dans trois bocaux en 1992 par l’artiste allemand Wolfgang Laib. Une œuvre symbolique qui donne d’ailleurs son titre à l’exposition.
Jouer avec l’éphémère
« Le musée n’est pas une collection d’objets, mais une collection de lentes catastrophes naturelles », écrit l’anthropologue américain Fernando Domínguez Rubio dans son ouvrage Still Life. Ecologies of the Modern Imagination at the Art Museum [Chicago University Press, 2020, non traduit, NDLR]. Certes, mais quelques artistes ont décidé de jouer avec cette altérité programmée et de lui donner une place dans leur processus créatif. Il en va ainsi de la Britannique Jesse Darling dont les Untitled (Still Life) parsèment le parcours. Elle place dans des vitrines hermétiques et transparentes des bouquets de fleurs qui évolueront et faneront durant l’exposition.
Une autre vision de la biodiversité
De la peinture à l’installation en passant par la projection vidéo ou la sculpture, les formes et les messages varient, offrant aux visiteurs un très dense flot de découvertes et de regards différents sur la place de la biodiversité dans notre société. Jusqu’à sa représentation parfois fantasmée comme le montre l’une des dernières œuvres de l’exposition, Surge (Social Cataract) d’Oscar Murillo. Y est représentée une expression de notre vision déformée de ce qui nous entoure. Sur la toile, s’affiche un champ de nymphéas halluciné faisant un lien direct avec les dernières œuvres peintes par Claude Monet à Giverny alors que la vue de ce maître de l’histoire de l’art était altérée par la cataracte.
Habituée des mises en abyme, l’équipe curatoriale a ajouté un accrochage à l’accrochage avec la présence d’artistes ayant orbité autour du Capc et dont le travail va dialoguer avec l’exposition en cours. Jusqu’en septembre, 13 tableaux hauts en couleur et en symbolique de l’artiste autodidacte franco-colombienne Emma Reyes (1919-2003) seront visibles. Puis viendront les tours de Kinke Kooi, Ben Thorp Brown et Faith Wilding. Une réflexion globale qui devrait contenter jusqu’aux plus allergiques à l’art contemporain.
Guillaume Fournier
Informations pratiques
« Pollen »,
jusqu’au dimanche 31 janvier 2027,
Capc musée d’art contemporain de Bordeaux, Bordeaux (33).