Marqueur culturel et social important du quartier Saint-Michel, à Bordeaux, le marché des Douves fête ses 10 ans en fanfare. L’occasion de revenir sur cette folle aventure avec Kirten Lecoq, directrice de La Halle des Douves, l’association en charge du lieu.
Quelle était la volonté derrière la création du marché des Douves ?
Il a été construit sous impulsion citoyenne. Les habitants du quartier réclamaient un marché couvert car ils n’y avait que les Capucins, mais qui était un marché de gros. Il ouvre en 1886, fonctionne pendant près d’un siècle, mais doit fermer en 1975 avec la concurrence du marché des Capucins devenu un marché de détail. C’est à nouveau sous une impulsion citoyenne qu’il va renaître.
Après 10 ans d’un long processus, il rouvre en septembre 2015 notamment grâce à l’implication de l’association La Halle des Douves qui gère le marché depuis. Nous voulions créer un lieu de vie pour les associations et les habitants du quartier favorisant la mise en relation, les rencontres et la création collective. Sur une année, nous accueillons près de 1 500 événements portés par des associations. Notre mission passe aussi par différents projets comme la webradio, radio Douves ; un travail autour des voyages culinaires ; un travail de mémoire vivante autour de l’histoire du lieu… Beaucoup de choses passionnantes.
Nous avons enfin un travail autour de la Fabrique des Douves pour les droits culturels ; une action de recherche autour de la mise en place de ces droits fondamentaux avec les acteurs du territoire.
Comment ce lieu hybride a-t-il évolué en 10 ans ?
C’est un lieu d’innovation sociale et culturelle où rien n’est gravé dans le marbre. Aujourd’hui, nous avons 200 structures membres et une centaine qui s’impliquent régulièrement. Ce que nous avons réussi à faire en dix ans, c’est de créer un lieu identifié comme un espace de rencontre où l’on favorise la co-construction. C’est aussi un endroit pour débattre de politique de religion, d’enjeux sociétaux, sans prosélytisme.
Comment faire cohabiter près de 200 associations dans un tel lieu ?
Au niveau physique, personne n’a de bureau dans le marché des Douves. Nous mettons à disposition des espaces et les structures viennent en proposant des projets. Nous favorisons la co-construction pour encourager la rencontre et aussi mutualiser les locaux disponibles. Nous essayons d’ailleurs de proposer des temps de restitution en invitant toutes les structures à prendre part.
Le marché a-t-il rencontré son public, notamment celui qui habite le quartier ?
Le lieu s’est véritablement inscrit dans le territoire, reconnu comme un lieu ressource pour les acteurs et les habitants. Notre ambition est d’être en porosité avec le quartier pour que les habitants s’emparent de cet espace notamment grâce aux outils projet que nous développons autour de l’alimentation, de la mémoire vivante, de la web radio… C’est quelque chose qu’il faut travailler au quotidien car le bâtiment peut impressionner et certaines personnes n’osent pas franchir nos grilles…
Quelles sont les réjouissances prévues pour les 10 ans avec l’événement Douves’it ?
Une programmation très dense, centrée autour de la thématique « en fête ». Il y aura toujours des incontournables comme un temps de regards croisés apportés par la Fabrique autour du sens de la fête mais aussi des happenings de structures ou des propositions hybrides comme « fête, une mo(t)saique » avec Proxima Centauri, Evolution Urbaine, le collectif Mixeratum Ergosum et 123 c’est parti. Il y a beaucoup de choses à découvrir. Nous avons aussi un flash mob pour jouer aussi sur la notion de dedans /dehors.
La pérennité du lieu est-elle assurée ? Comment fonctionne financièrement le lieu ?
Le bâtiment lui ne va pas bouger, c’est sûr ! (rires). L’association souhaite s’inscrire dans la durée, il y a un projet d’en faire un lieu culturel de proximité, le dossier est en cours. Au niveau des ressources, nous avons les adhésions, le café associatif qui est au rez-de-chaussée et le soutien de l’association par la Ville de Bordeaux.
On se donne rendez-vous dans 10 ans ?
Oui ! J’ose espérer que cet endroit sera toujours un lieu d’expression, ouvert pour les acteurs et les habitants du quartier. Un lieu des possibles. Espérons que financièrement cela sera solide aussi. Même si le modèle économique va un peu évoluer notamment dans la mise à disposition payante des locaux pour des sociétés privées ou des associations qui sont en dehors de Bordeaux que nous allons peut-être accentuer. Mais il faudra toujours garder le sens du lieu où nous sommes dans la rencontre et l’échange.
Propos recueillis par Guillaume Fournier
Informations pratiques
Douves’it,
du samedi 6 au dimanche 7 décembre,
marché des Douves, Bordeaux (33).