Le centre d’art d’Anglet accueille un ensemble d’œuvres et de nouveaux modules de Vincent Mauger, et ouvre à toute l’étendue et à la force de sa démarche.

Vincent Mauger associe des matériaux, des techniques de construction et des formes proliférantes, à la fois archaïques et sophistiquées, et développe des compositions à grande échelle, qui questionnent notre relation à l’espace. Il cherche surtout à interroger la connaissance que l’on croit avoir des choses, en perturbant leur lecture par des usages inédits ou par de nouvelles associations.

Dans ses sculptures et ses installations, il exploite les tensions, les contradictions entre l’esthétique d’un monde virtuel et une dimension plus artisanale, plus brute. Les éléments utilisés (briques alvéolaires, parpaings, tuyaux, tubes PVC, aggloméré hydrofuge) sont ordinaires, employés habituellement pour le bâtiment, et adroitement métamorphosés par le biais d’assemblages inédits, de découpes inattendues.

Fragment de construction complexe

L’artiste s’impose un module, un principe constructif ou un mode opératoire à partir duquel il développe la composition et convoque la singularité de la structure. Le matériau n’a pas de qualité plastique évidente et se prête à de multiples opérations de transformation et d’arrangement. Il participe ainsi à l’élaboration de charpentes, de squelettes ou de paysages très proches de l’ingénierie de la modélisation 3D, d’étranges ruines, de surfaces arides, artificielles ou d’un fragment de construction complexe ou primitive, peut-être défensive, peut-être offensive.

L’organisation de chaque proposition rappelle à la fois l’univers des cabanes, mais également celui des mathématiques, de la programmation informatique et, plus largement, de la représentation scientifique. Parfois, une impression plus agressive et plus chaotique se dégage et donne l’impression d’une explosion dont le mouvement aurait été figé.

Ouvrir l’espace à tous les possibles

Vincent Mauger convoque l’exposition et ses diverses propositions comme un théâtre abrupt, tranchant et rebelle qui souligne d’abord une détermination à occuper, à répandre et à solidifier. Il donne à voir les déchirures de son relief, la rugosité de sa respiration, la présence incisive de ses contours, de ses frontières mais aussi la puissance de son imaginaire.

Cette compacité oppose une résistance et renvoie à l’existence du corps qui, tout en s’y confrontant, y puise toutes les ressources nécessaires à une rencontre originale. Par son geste capable à la fois d’émergence et de contrôle, l’artiste ouvre d’emblée l’espace à tous ses possibles.

L’installation, portée par une écriture plastique placée sous le signe de la cassure et de la liaison, est un mode de perception, un mode d’accès à toutes les facettes de l’espace et ses données architecturales. Elle relève bien sûr d’une production technique, d’un savoir-faire, d’une évidente connaissance des matériaux, mais aussi d’une aptitude à mettre en relation.

Entre le réel et le virtuel, l’ordre et le chaos, Vincent Mauger ne se contente pas de « parler » de l’espace. Il a aussi pour enjeu de faire « parler » l’espace. En référence aux jeux de construction et formes qui se construisent bloc par bloc, cette exposition en apporte une preuve magistrale.

Didier Arnaudet

Informations pratiques

« Le mondes des blocs – Vincent Mauger »,
du samedi 16 décembre au samedi 30 mars 2024,
Villa Beatrix Enea et galerie Pompidou, Anglet (64).

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