Du samedi 13 au dimanche 14 avril, dans la citadelle inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco, le Printemps des vins de Blaye attirera les projecteurs sur l’appellation de 6 500 hectares. Un moment qui devrait indéniablement remettre l’AOP de ce bout de Gironde à une petite longueur de Bordeaux. Un raout hautement sympathique rappelant que Blaye est une AOP d’artisans, de structures familiales, produisant des vins rouges, mais également blancs, assez singuliers et souvent assez digestes pour qu’on s’y arrête.
Nous partîmes donc le cœur léger sur cette rive droite entre citadelle, marais, Gironde épaisse, bâtisses précieuses du XVIIe siècle, mais également de petits trésors biodynamiques sur lesquels l’Organisme de défense et de gestion aurait tort de ne pas s’appuyer pour construire son renouveau.
Sous le ciel constamment menaçant de ce mois de mars, prenons place dans la vieille — un rien désuète — salle de dégustation de la Maison du Vin de Blaye à quelques encablures de la citadelle de Vauban. L’ODG, avec à sa tête Karine Cailleaux-Breton, fut l’hôte impeccable de cette session. Au menu, une quarantaine de vins estampillés 2021 et une petite dizaine de blancs secs, qui doivent, nous dit-on, annoncer la renaissance d’une production jusqu’alors faiblarde ou dormante. Nous verrons que le compte n’y est pas, sauf à vouloir refaire ce qui se fait ailleurs en Gironde autour de vins blancs variétaux et thiolés1.
Pour la dégustation exhaustive de rouges, l’exercice n’était pas évident, il fallait tout d’abord se défaire de l’idée reçue que 2021 était un millésime en dessous. Effectivement, il est considéré comme le millésime le plus compliqué (fatigant, ont pu dire quelques vignerons) depuis 2013, avec une succession d’aléas tout au long de l’année entre gel, mildiou et un été frais peu ensoleillé. Nous apprendrions que la chose n’était pas totalement compromise et que la séance fut bien belle.
Trois terroirs distincts, entre sable, argile et calcaire
On entre dans cette dégustation tête baissée et par type de sols : sablonneux, argilo-calcaire-graveleux et enfin argilo-calcaires. Château Grand Moulin, sur sols sablonneux, offre une entrée en matière impeccable. Une bouche éclatante (à défaut d’être puissante) constituée de notes suggérant les fruits rouges, la griotte, saupoudrées d’un soupçon de toast et, au final, un jus très gourmand et en place.
Château Les Aubiers retiendra encore notre attention avec ces expressions au nez de cassis. La bouche se montre extrêmement salivante et pleine d’allant. Château Haut-Grelot Coteaux de Méthez se montre sous un beau jour avec des exhalaisons humiques et de frondaison fraîche. La bouche s’avère charmeuse autour de notes de moka et de fruit noir.
Quelques vins de soif
Dans le registre, un peu attendu, du vin de soif, retenons le Château Pinet La Roquette avec son nez de sous-bois et sa bouche, certes fluide, mais sur le fruit frais et digeste. Également le Château Crusquet Sabourin avec des notes de rafles et fruit rouge vif et acidulé. Ou encore, dans ce même registre, le Château Moulin des Blais qui présente un nez un rien végétal et une bouche portée par une acidité joyeuse.
Château Les Petits Arnauds constitue un coup de cœur. Le vin est fringant et frais au nez. La bouche est tendre et délicate avec en milieu de bouche la belle chair d’un fruit désaltérant et éclatant.
Château Peybonhomme-Les-Tours, cuvée Énergie, est un concentré savoureux d’élégance. Le nez est fumé, la bouche gracile et digeste convoque noyau de cerise et quelques notes végétales très rafraîchissantes.
Concernant les blancs, nous avons jeté notre dévolu sur le Château Monconsei-Gazin qui avance au nez sur des notes certes thiolées mais discrètes et non assommantes. La bouche oscille entre notes exotiques d’ananas et chair de pêche blanche. La finale propose de nous arrêter sur des notes fumées et une amertume élégante.
De Blaye à Mortagne, le long de l’estuaire
Pour ce moment accordé à la large appellation, nous vous recommanderons de prendre le temps de traverser le Blayais de part en part, de le déborder. Au départ de Bordeaux, s’arrêter à Blaye, opter pour un repas à l’hôtel La Citadelle, avec vue sur l’estuaire, visite de l’incontournable château Peybonhomme-Les-Tours, avant de filer toutes voiles dehors, le coffre plein de quilles, jusqu’à Mortagne-sur-Gironde pour passer la nuit au Domaine du Meunier et aller dîner chez Dame Casserole.
Vous ne pourrez faire l’économie d’un retour tranquille via la route de la Corniche, à partir de Saint-Seurin-de-Bourg. Le vent du large et les tanins doux vous auront revigorés pour un moment. Une échappée belle et insolite à portée de main.
Henry Clemens
Informations pratiques
Maison du Vin de Blaye
12, cours Vauban, 33390 Blaye
Tél. : 05 57 42 94 20
Office de Tourisme de Blaye
1, place de la Citadelle, 33390 Blaye
Tél. : 05 57 42 12 09
Hôtel La Citadelle
5, place d’Armes, 33390 Blaye
Réservation : 05 57 42 17 10
Chateau Peybonhomme-Les-Tours
33390 Cars
Tél. : 05 57 42 11 95
Domaine du Meunier
36, quai de l’Estuaire, 17120 Mortagne-sur-Gironde
Dame Casserole
26, quai de l’Estuaire, 17120 Mortagne-sur-Gironde
Réservations 06 95 39 14 36
- Composé désirable et fortement recherché dans les vins blancs et rosés