Jusqu’au 31 août, avec « Stéréo » Rainier Lericolais s’empare de la galerie La Mauvaise Réputation, à Bordeaux, pour mieux en « jouer » à la faveur d’une exposition musicale.

Plasticien protéiforme, né en 1970 à Châteauroux, travaillant à Paris, durablement marqué par les avant-gardes du XXe siècle comme par les scènes post-punk et industrielle, Rainier Lericolais nourrit en permanence ses œuvres plastiques d’influences musicales. Rien d’étonnant au regard de ses collaborations, de Simon Fisher Turner à Stephan Eicher, de Minizza à Klara Lewis en passant par Sylvain Chauveau.

Après « Cut Up », en 2019, le revoilà à la galerie bordelaise LMR avec une proposition paradoxale, « Stéréo », dédiée à la musique et dépourvue de bande-son ! « L’accrochage devient une nouvelle partition pour la galerie. J’induis un jeu dans cet espace. Je “joue” de la galerie. »

Collages amoureux en petit format

Sous les regards bienveillants de Maman (Cosey Fanny Tutti) (2024) et de Papa (Moondog) (2023), le corpus explore l’une des obsessions/fascinations de l’artiste pour l’histoire et les petites histoires de l’enregistrement de la musique. Ainsi, y retrouve-t-on un carton non perforé de Pierre Charial, qui a dédié sa vie à l’orgue de Barbarie dans une approche résolument moderne à tel point que György Ligeti, Luc Ferrari ou Iannis Xenakis lui ont notamment fait confiance.

Collages amoureux en petit format, peinture sur toile, Spiegel im Spiegel (2023) en hommage à la pièce pour piano et violon d’Arvo Pärt, composé en 1978, sculptures, Carillon (2012) réalisée en porcelaine d’après le cylindre phonographique de Thomas Edison, et le duo Balalaïka (2023) et Mandoline (2024), évocation de masques africains aussi abstraits que hiératiques, le parcours emprunte plus d’une technique chère à ce disciple du sampling pour qui « musique et arts plastiques partagent le même vocabulaire ».

« Le tarot d’Anaïs » aussi présenté

Toutefois, c’est bien la série Partition, fragments 1 à 17 (2024) qui happe le regard. Cet ensemble inédit de dessins à l’encre de Chine forme un morceau de 24 minutes, chaque fragment durant 1 minute 40, que l’on peut interpréter, enregistrer, ou encore écouter via un QRcode menant au BandCamp de Rainier Lericolais. « J’avais envie que tout le monde s’approprie cette musique. Par ailleurs, ces retranscriptions posent une vraie question car si regarder la musique est, a priori, facile, réalise-t-on que l’on observe quelque chose d’invisible ? »

Parallèlement à « Stéréo », la librairie LMR accueille « Le tarot d’Anaïs », présenté en décembre dernier, à Paris, par Alexandra Lantz lors de « 9’23 divinatoires ». Merveilleuse relecture personnelle du Jeu de Marseille, conçu par les Surréalistes — André Breton, Victor Brauner, Oscar Dominguez, Max Ernst, Jacques Hérold, Wifredo Lam, Jacqueline Lamba, André Masson et Frédéric Delanglade —, alors réfugiés en 1942 dans la cité phocéenne. Splendeur que l’on peut offrir ou se procurer…

Marc A. Bertin

Informations pratiques

« Stéréo », Rainier Lericolais,
jusqu’au samedi 31 août,

« Le tarot d’Anaïs », Rainier Lericolais,
jusqu’au samedi 31 août,
librairie LMR, Bordeaux (33).

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