Jusqu’en septembre le musée Guggenheim de Bilbao accueille l’exposition « Signes et Objets. Pop art de la collection Guggenheim » qui revient sur les fondamentaux de ce mouvement artistique avec une part belle accordée à ses artistes emblématiques, Warhol et Lichtenstein en tête.

Shebam, pow, blop, wizzzzzz ! La nouvelle exposition du Guggenheim Bilbao propose un voyage à la rencontre d’une école de l’histoire de l’art qui déchaîne toujours les passions.

Commençons par une petite précision. Le terme Pop art est inventé, en 1958, par le conservateur britannique Lawrence Alloway, un visionnaire qui organise, en 1963, pour le compte du Salomon R. Guggenheim Museum à New York, une exposition autour de ces œuvres qui se jouent avec mordant et ironie des codes de la société de consommation.

Baptisée « Six Painters and the Object », cette pierre fondatrice dans la reconnaissance de ce courant devait initialement se nommer « Signs and Objects ». Un titre repris ici tel un clin d’œil historique par les deux commissaires Joan Young et Lauren Hinkson, qui sont d’ailleurs conservatrices au musée new-yorkais.

La sélection occupe deux salles principales et présente 17 artistes et 40 œuvres, toutes puisées dans les collections de la fondation Guggenheim. Le compte pourrait peut-être paraître léger, mais les pièces retenues — des années 1960 à nos jours — racontent chacune une histoire particulière de ce mouvement artistique apparu en Angleterre à la fin des années 1950 avant de se développer lors de la décennie suivante aux États-Unis.

Instruments de critique sociale

Le premier espace est consacré aux objets. Y sont utilisés des composants de toutes sortes et de toutes origines, certains sont même trouvés dans la rue comme les bouts de carton utilisés par l’américain Robert Rauschenberg pour sa série Cardbirds, dont une partie est exposée ici. Objets du quotidien, détournés de leur fonction première, ils deviennent ainsi des instruments de critique sociale, comme les affiches des films Casablanca et Tendre est la nuit, revues par le plasticien italien Mimmo Rotella.

Du détournement à l’absurde, il n’y a qu’un pas, franchi non sans humour par Claes Oldenburg avec son Soft Pay-Telephone (1963). Si la brillante surface du vinyle évoque la consistance des matériaux industriels dont est fait un téléphone, sa nature avachie annihile la perspective de s’en servir.

Le sculpteur américain, d’origine suédoise, poursuivra longtemps son entreprise de ramollissement en changeant même d’échelle, à l’instar de Soft Shuttlecock, immense volant de badminton à la jupe de plumes désarticulée qui occupe toute une salle dédiée. Cette sculpture de près de huit mètres de hauteur, conçue spécialement pour la rotonde du musée Guggenheim de New York, en 1995, avec son épouse Coosje van Bruggen, avait déjà été présentée pour l’inauguration du Guggenheim Bilbao en 1997.

Andy Warhol à l’honneur

Cette figure ronde de la bâtisse new-yorkaise se trouve également dans l’autre salle consacrée aux signes avec deux œuvres de Richard Hamilton, considéré comme l’un des pères fondateurs du Pop art. Deux versions du musée soit en noir et blanc, soit entiché d’un spectre de couleurs, précurseur de la sérigraphie chère à Andy Warhol. La figure iconique du Pop art, elle, est à l’honneur dans cette seconde partie de l’exposition avec deux œuvres, Self-Portrait (1986) et Orange Disaster #5 (1963), où l’image d’une sinistre chaise électrique est reproduite 15 fois.

Autre mastodonte incontournable, Roy Lichtenstein. Quatre œuvres dévoilent un aperçu du travail graphique de cette légende connue du très grand public grâce à son esthétique au pointillisme 2.0 multipliant les références aux comics américains.

La mystérieuse mort de Pinocchio

Partout sur les murs s’étalent les références à la culture populaire, aux médias de masse et à cette standardisation de nos modes de vie, empruntant des formes diverses, de la mystérieuse vidéo Bootleg Empire (1998) de l’Écossais Douglas Gordon (lauréat du Turner Prize 1996) aux néons de l’Américano-Grecque Chryssa avec Construction Study for “That’s All (1969–70).

Une culture populaire malmenée jusqu’au bout avec une dernière mise en scène macabre, la mort par noyade de Pinocchio, où l’ineffable Maurizio Cattelan laisse avec Daddy, Daddy (2008) la porte ouverte pour savoir s’il s’agit d’un meurtre ou d’un suicide de la créature de Geppetto. Le mieux reste de monter d’un étage pour contempler la scène avec une perspective différente et tenter de se faire son propre avis…

Les plus curieux en profiteront pour explorer les riches collections permanentes du musée permettant de continuer leur voyage dans le Pop art et les autres grands courants artistiques de la fin du XXe siècle.

Guillaume Fournier

Informations pratiques

« Signes et Objets. Pop art de la collection Guggenheim »,
jusqu’au vendredi 15 septembre,
Musée Guggenheim Bilbao (Espagne).

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