Direction Madiran mais également Pacherenc du Vic-Bihl, deux AOP du vignoble du Sud-Ouest à découvrir d’urgence et auxquelles nous décernerions bien un triple A.
Appellations d’origine protégée et regroupées, Madrian & Pacherenc du Vic-Bihl s’étirent sur les monts arrondis et les beaux versants caressés par le foehn du piémont pyrénéen.
Ce petit territoire du sud-ouest de la France, à cheval sur les départements du Gers, des Pyrénées-Atlantiques et des Hautes-Pyrénées, aime à revendiquer qu’il possède des blancs secs, des blancs moelleux et des rouges, produits à partir de cépages endémiques singuliers. Aujourd’hui, l’AOP s’inscrit dans la grande famille du vignoble du Sud-Ouest aux 17 AOP et 12 IGP.
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Dans la famille du Sud-Ouest, je demande Madiran
On retient habituellement de Madiran qu’elle rime avec antan (et Zan), qu’elle est une étoile vineuse du Sud-Ouest, pleine de caractère et d’aspérités. Originaire d’un vieux pays qui s’accroche encore follement à ses reliques ancestrales, au rugby et la Fête du Vin de Madiran de la mi-août autour d’une poignée de femmes et d’hommes bérétés.
Il est aujourd’hui également incarné par des vigneronnes et des vignerons qui souhaitent rebattre les cartes, sans pour autant perdre ni accent ni béret. Les hautes vignes de tannat1, d’un vert tendre et vif en ce début d’été, allumeront bientôt les vins de leurs intensités tanniques et particulièrement riches en polyphénols2.
Une nouvelle histoire est en train de s’écrire
Force est de constater que les vins s’avèrent aujourd’hui bien plus policés, sapides et buvables qu’avant. Une nouvelle histoire est en train de s’écrire pour sortir joyeusement de l’ornière organoleptique dans laquelle l’AOC de 1 400 hectares s’était inscrite. Désormais, on maîtrise très finement extractions et rendements pour ne pas lasser les palais, à l’instar de son copain le malbec que les cadurciens ont rendu soyeux et beau.
Sans que ni l’un ni l’autre ne vende son âme au diable. La cave coopérative de Crouseilles3 s’est érigée en porte-étendard de ce renouveau des profils gustatifs. Une virée dans son antre tuyautée et odorante, sous une magnifique charpente en béton des années 1950, révèle un savoir-faire qui promeut avec bonheur et élégance l’AOP du Sud-Ouest, son identité à travers, en particulier, quelques dignes cuvées parcellaires. Cajolant dans le sens du poil les consommateurs ou œnophiles attentifs à la dimension vertueuse et environnementale, on sacre ici à travers un parcours extérieur ludico-artistico-pédagogique le ver de terre, promeut l’enherbement, la taille douce et les effeuillages parcimonieux.
La fraîcheur des blancs s’impose dans le Pacherenc du Vic-Bihl
Château Viella est un site, presque avant d’être un vignoble, et la visite de cette exploitation vaut son pesant d’or tant l’horizon à partir de ce tertre est beau, permettant d’observer la chaîne des Pyrénées dans une brume électrique et diffuse.
Ici encore, la vigne frappe par la luminescence chlorophyllienne de sa teinte. On retiendra de la dégustation d’une trentaine de vins, organisée dans la grande salle sans oripeau du château, que les rouges et les blancs offrent aujourd’hui une multitude de facettes gustatives toutes parfaitement gourmandes et parfois originales. Les vendanges passerillées4 ont construit la renommée du pacherenc. Des vins souvent définis par leur richesse aromatique mais aussi (surtout) par leur belle fraîcheur. La lente concentration naturelle en sucre des raisins préserve l’acidité nécessaire à cet équilibre. Les premiers raisins, caressés par un doux foehn5, sont généralement vendangés, à la main, entre la mi-novembre et fin décembre !
Aujourd’hui, nous avons choisi de nous pencher sur les vins blancs secs, pleins de finesse et sans afféteries, produits sur l’AOP de quelques 300 hectares de Pacherenc du Vic-Bihl6 – qui signifie « piquets (de vigne) en rang du Vieux Pays »en béarnais. Une confidentielle engeance vaguement ombrée par Jurançon, sa toute proche voisine. La dégustation d’une petite dizaine de vins blancs secs s’avère d’un intérêt majeur et dessine une belle facette de la discrète AOP.
Comme pour sa voisine basque la production de blanc sec retient toute notre attention. D’abord, un peu moins explosifs ou diserts que leurs voisins, les vins secs d’arpents, majoritairement exposés à l’ouest pour conserver leur fraîcheur et issus de petit manseng, gros manseng et de petit courbu (parfois complétés par l’arufiac ou le sauvignon blanc), livrent une partition tout à fait exquise de fruits mûrs et fins, pleins d’une douce vivacité. On dira aisément de ces secs modernes qu’ils respirent bon le lieu et le terroir.
Un triple A
Chaque troisième week-end de novembre, une fois les vendanges terminées, le vignoble de Madiran revêt les belles couleurs automnales dans une arrière-saison particulièrement clémente et réchauffée par le foehn montagnard descendant. Une trentaine de domaines et châteaux ouvrent alors portes et cœurs pour vous inviter à découvrir Madiran mais également Pacherenc du Vic-Bihl, deux AOP auxquelles nous décernerions bien un triple A. À découvrir dare-dare.
Henry Clemens
- Cépage originaire du Béarn largement implanté à Madiran. Il doit son nom à sa nature riche en tannins.
- Le tannat est particulièrement riche en polyphénols et aurait des propriétés anti-oxydantes qui joueraient un rôle essentiel dans la protection contre les maladies cardio-vasculaires.
- www.crouseilles.com/notre-vignoble/
- Une technique qui consiste à laisser les raisins sur pied afin qu’ils sèchent sous l’action conjuguée du soleil et du vent.
- Vent fort, chaud et sec, apparaissant quand un vent dominant est entraîné au-dessus d’une chaîne montagneuse et redescend de l’autre côté.
- La seule mention « Pacherenc du Vic-Bihl » sur l’étiquette indique que le vin est doux. Lorsqu’il est sec, c’est précisé.
Informations pratiques
Madiran, Pacherenc du Vic-Bihl
4, rue de l’Église, 65700 Madiran